Entre temps, en 1120, son frère Guillaume Adelin, héritier du trône étant mort, Henri Ier la désigna pour lui succéder dans l’espoir qu’elle donnerait naissance à un fils qui deviendrait roi d’Angleterre. En renâclant, Etienne de Blois, neveu d’Henri Ier, et lui aussi petit-fils de Guillaume le Conquérant par sa mère, prêta serment d’allégeance à sa cousine.
A la mort d’Henri Ier, Mathilde, qui un an plus tôt avait mis au monde un fils, Henry (futur Henry II), était en Anjou. Etienne de Blois, alors dans le Pas-de-Calais, vit l’opportunité de se faire roi à la place du roi. S’embarquant d’urgence pour l’Angleterre, galopant vers Londres, où il se fit reconnaitre comme roi, toujours ventre à terre il se rua à Winchester pour se saisir du trésor royal comme l’avait fait Henri Ier vingt-cinq ans plus tôt. La plupart des barons, convaincue que Mathilde n’avait pas les compétences d’une régente, le rejoignirent dans sa trahison. Couronné par Guillaume de Corbeil, archevêque de Canterbury, accepté par le clergé anglais et le pape, Etienne était bel et bien le souverain d’Angleterre et Mathilde ne pouvait rien y changer. Mais toujours aussi énergique et ambitieuse, elle ne se laissa pas déposséder facilement de son trône. Elle hurla à l’usurpation, débarqua en Angleterre en 1139 et s’installa à Bristol où elle attendit qu’on lui reconnaisse ses droits.
Avec le temps, l’incompétence d’Etienne s’avérant, des barons tournèrent casaque et rejoignirent Mathilde qui, se montrant généreuse avec eux, lui permirent de former une armée. En 1141, elle battit Etienne qui fut capturé, déposé et emprisonné. Restait à Mathilde à se faire couronner.
Toutefois, sa situation militaire était plus faible qu’il n’y paraissait. Elle prit ses quartiers à Westminster dont elle fut délogée par les Londoniens.
Prenant le parti de forcer Henri, évêque de Winchester et frère d'Etienne, à la couronner elle assiégea la ville mais fut mise en déroute. Elle ne pouvait pas non plus compter sur le secours de son mari qui, occupé au contrôle de la Normandie, lui refusa son soutien.
Etienne fut échangé contre Robert de Gloucester, demi-frère illégitime de Mathilde et leader charismatique de ses troupes, et retrouva son trône en décembre.
Après mille et une aventures rocambolesques pour sauver sa vie, Mathilde comprit qu’elle ne serait jamais reine. Mais il y avait son fils. A défaut de combattre pour elle, elle continua la lutte pour lui.
Robert de Gloucester mourut en 1147 privant Mathilde de son plus fidèle allié.
A cette époque, elle occupait illégalement le château de l’évêque de Salisbury ; menacée d’excommunication, elle choisit de se retirer en Normandie laissant son fils se débrouiller tout seul.
En 1153, celui-ci débarqua à la tête d’une puissante armée.
De son côté, Etienne affaibli par les morts de sa femme Mathilde de Boulogne et de son fils Eustache, ayant perdu toute combativité, accepta de reconnaitre Henry comme son successeur. Un an plus tard, Etienne mourait à son tour.
Après avoir été son ennemie la plus acharnée, en survivant à Etienne, Mathilde eut en quelque sorte le dernier mot et la satisfaction de voir son fils devenir roi d’Angleterre sous le nom d’Henry II.
Impératrice du Saint-Empire romain germanique, comtesse d'Anjou, mais aussi duchesse de Normandie, Mathilde se retira dans le prieuré Notre-Dame-du-Pré de Quevilly, dépendant de l'abbaye du Bec-Hellouin dont elle fut toujours une grande bienfaitrice.
En un temps où elle était tombée malade et sa guérison incertaine, elle avait demandé à son père l’autorisation de s’y faire inhumer ce que celui-ci lui avait refusé prétextant la modestie du lieu lui préférant la cathédrale de Rouen où reposaient son ancêtre, le duc de Normandie Rollon. Mais, vaincu par la sincère piété de sa fille, il céda. Ainsi, bien des années plus tard, fut-elle ensevelie dans le lieu de son affection avec la bénédiction de son père.
On l’inhuma dans la nef de l’église de l’abbaye avec cette simple épitaphe. : « Ci-gît la fille, femme, et mère d'Henri ». Par miracle, les sépultures de l’abbaye réchappèrent aux profanations révolutionnaires. Elle fut affectée à l’armée jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
Néanmoins, l’église mal reconstruite des années auparavant, fut rasée par arrêté préfectoral de 1809 à 1811 laissant le sol pavé, quelques vestiges…et la tombe de Mathilde qui fut découverte en 1846 Identifiée, ses restes furent portés en la cathédrale de Rouen et inhumés dans la chapelle St-Pierre-et-St-Paul. En 1871, une plaque fut déposée portant l'inscription suivante:
ORTU MAGNA, VIRO MAJOR, SED MAXIMA PARTU,
HIC JACET HENRICI FILIA, SPONSA, PARENS.
MATHILDIS FILIA HENRICI I ; REGIS
ANGLORUM ET NORMANNIE DUCIS
UXOR HENRICI V, COESARIS MATER HENRICI II
PATRIS RICHARDI COR LEONIS DICTI
OSSA EJUS IN SANCTUARIO VETERIS ECCLESIAE
MONASTERII BECCENSIS A. D. MDCCCXLVI SUNT
ANNO DNI MDDDLXXI
R. I. P.
Pour une raison que j'ignore, ils furent exhumés puisqu'en 1879 on les retrouvait dans la sacristie en attendant leur réinhumation. Je ne sais si cela fut fait et ce qu'il reste de cette inscription.