COLLÉGIALE, CLOÎTRE SAINT-HONORÉ ET COLLÈGE DES BONS-ENFANTS (Paris) (disparus)
© Musée Carnavalet /Estampes
En 1204, Regnauld Cherin (Cherey) et sa femme donnèrent un terrain près des murs de Paris, sur le chemin qui conduisait à Clichy, pour y bâtir une église dédiée à saint Honoré, évêque d’Amiens au 6ème siècle. L’année suivante, le prieur de St-Martin-des-Champs leur accorda un arpent de terre pour y édifier une église, un cimetière et une maison pour le prêtre qui desservirait l’église construite dès 1208. Devenue collégiale en 1209, elle fut desservie par des chanoines à partir de 1214.
Dépendance de St-Germain-l ’Auxerrois, bordée par un cloître, entourée des logis des chanoines, avec l’ensemble de ses dépendances, la collégiale possédait tout l’îlot que bordent, de nos jours, les rues Croix-des-Petits-Champs, Saint-Honoré (qui lui doit son nom), des Bons-Enfants et Montesquieu ouverte en 1802.
Collège des Bons-Enfants et chapelle Saint-Clair
Fondé en 1208, près de la collégiale Saint-Honoré, pour servir à treize pauvres étudiants de Paris, le collège des Bons-Enfants était le premier collège fondé pour des nationaux. D'abord nommé Hôpital des pauvres écoliers, ces derniers étaient obligés, comme la plupart des religieux de Paris, de demander l'aumône dans les rues de la capitale. Puis, grâce aux libéralités de personnes bienfaisantes, notamment celles de Jacques Cœur, qui procurèrent à ce collège un revenu suffisant, les écoliers cessèrent d’implorer la charité des Parisiens.
La chapelle Saint-Clair occupait tout le rez-de-chaussée d'une maison de cinq étages
En 1605, les biens du collège furent transmis au chapitre de la collégiale Saint-Honoré et un séminaire y fut établi. Le nom de la rue où il se situait conserve son souvenir.
Etat des parcelles au début du 17ème siècle : A. Berty et A. Lenoir
De nos jours, elle serait là © Google Earth/MCP
L’église
La collégiale au 18ème siècle (L. Taxil)
H. Chapelle (1850 - 1925) - Musée Carnavalet
Enchâssée dans le cloitre St-Honoré, adossée aux maisons canoniales qui ouvraient rue St-Honoré, orientée normalement, elle fut l’une des plus petites églises de Paris. Paroissiale pour l’intérieur du cloître, pendant peu de temps elle posséda un petit cimetière le long de la rue des Bons-Enfants. « Toute voûtée, mais basse et petite », ni son architecture intérieure, ni son ornementation n’ont laissé de souvenirs impérissables. Le chœur était fermé par une grille. On lui connait plusieurs chapelles, dont la plus connue, Notre-Dame-des-Vertus, était celle où s’élevait le mausolée du cardinal Dubois. Les boulangers y ayant une chapelle, saint Honoré devint leur patron.
Grâce à la déclaration des biens immobiliers faite en 1790, on connait l’existence de quelques tableaux dont :
- La Présentation au temple de Philippe de Champaigne peinte en 1648. Le musée de Bruxelles conserve une copie d’après cette œuvre (cliché ci-après).
- L’Adoration des bergers de Nicolas Loir (1624-1679), longtemps attribuée à Sébastien Bourdon et conservée au musée du Louvre.
Agrandie en 1579, après la dispersion des chanoines en décembre 1790, elle devint très temporairement le siège de la Justice de Paix pour la section de la Halle-au-Blé. Elle fut vendue en 1792 à quatre investisseurs avec obligation de démolition.
Henri Chapelle (1850 - 1925) - 1914 -Musée Carnavalet
Henri Chapelle (1850 - 1925) - 1914 -Musée Carnavalet
Une fois l’église détruite, deux passages (Athènes et Marchand), formant un « T », furent percés et bordés par des maisons de rapport, dont l’une, une maison de tolérance, édifiée sur l’emplacement de la chapelle où avait reposé le cardinal Dubois, utilisa l’ancien caveau du cardinal comme fosse d’aisance. Les maisons des passages disparurent en 1854, et leurs derniers vestiges furent abattus en 1913.
Toutefois, en 1906, vraisemblablement dans la perspective de la prochaine démolition de l'enclos, comme cela fut le cas pour d'autres rues et quartiers de Paris promis à la démolition, la Mairie de Paris commanda au photographe Eugène Atget un petit reportage sur ces lieux,
Un régal pour les amoureux du vieux Paris disparu.
Divers recoupements entre les sources, almanachs, cadastres, descriptions permettent de déduire que les photos de 1906 correspondent à l'état du cloître en 1830.
Les angles de vues A, B, C, D, E des photos ci-dessous sont ajoutés sur le plan du cloître proposé par L. Taxil en annexe à sa communication de 1913 devant la Commission du Vieux Paris de la Ville de Paris.
Positions du photographe en 1906, ajoutées sur le plan de L. Taxil
A – Vers la rue Saint-Honoré - BnF
C -Du Passage Marchand - BnF
D - Vers la rue des Bons-Enfants - BnF
Le Lecteur
Y furent inhumés, entre autres…
Comme déjà précisé, l’église posséda un cimetière le long de la rue des Bons-Enfants, vers le n°10, qui touchait le collège de Bons-Enfants. Son existence fut courte. Les inhumations des habitants du Cloître-St-Honoré se faisaient dans les caveaux de l’église ou dans ceux de la chapelle Saint-Clair du collège en question.
Bien évidemment, parmi la poignée de personnalités qui y reposèrent le cardinal Dubois est de loin la plus célèbre.
►ALEXANDRE Richard († 1515)
Maître ès arts, prêtre et chanoine.
►ALLAIRE Guillaume (15 ??) et sa femme LANGLOIS Jeanne († 1534)
Procureur au Châtelet.
►BABOU Alphonsine de († 1617)
►BOISSONNET Jean († 1560)
Dit « de Valence », selon son épitaphe il était qualifié de « marchand suivant la cour ». Avec lui reposait sa femme, Jeanne Le Lieure († 1557).
►GRAVELOT Hubert François, Bourguignon d’Anville , dit (1699 - 1773)
Illustrateur, graveur, dessinateur et peintre français, bien oublié du grand public, il compte pourtant parmi les maîtres de l'illustration qui firent la gloire du livre français au 18ème siècle. Après un voyage à Saint-Domingue, où son père l'avait envoyé pour réfréner un peu ses débordements, il rentra en Europe et s'établit à Londres en 1732. A côté de grandes entreprises, comme illustrer les œuvres de Shakespeare, il commença à donner des scènes de mœurs et des croquis de vie quotidienne qui firent sa réputation. Il ouvrit une école que fréquenta Gainsborough. Rentré en France en 1745 ou un peu après, la vogue dont jouissaient ses vignettes trouva une confirmation définitive lors de la parution, en 1757, du Boccace qui constitue son chef-d'œuvre. La tournure vive, spirituelle ou grave qu’il savait donner à toutes les scènes qu'il dessinait firent de lui l'un des représentants les plus accomplis de l'époque de Louis XV. Il illustra également des œuvres de Racine, Corneille, d’Ovide, du Tasse, etc. On ne compte que fort peu de grandes planches dans son œuvre : ce ne sont que de petites vignettes justes de composition, piquantes dans l'exécution, qui suscitèrent l’admiration de Voltaire qui s'adressa à Gravelot pour qu'il illustrât ses tragédies. Si l’on ne sait pas grand-chose sur sa peinture, il est certain qu'il peignit des portraits et des scènes de genre. Homme sans ambition et sans « manège », passionnément épris de lecture et d'indépendance, il fut loin de tirer de ses succès tout le bénéfice qu'il aurait pu. Il mourut relativement pauvre, ayant cessé de travailler depuis plusieurs années à la suite d'un notable affaiblissement de sa vue.
►CHESNART Jean († entre 1479 et 1480)
Bourgeois de Paris et garde de la Monnaie de Paris, il semble avoir bénéficié d’une belle fortune notamment en immobilier. Généreux bienfaiteur de St-Honoré, le papa l’autorisa à établir une chapelle et un chapelain perpétuel pour la desservir et la doter. Fut-il inhumé dans l’église ? Seule sa fondation de messes de 1466 a été conservée. Y aurait-il confusion avec Jean Chesnart inhumé en l’église du St-Sépulcre ?
►DU CASTEL Regnault († 1554)
►DU GARD Pierre († 1547)
Seigneur de Thionville, écuyer, valet de chambre et tapissier ordinaire du roi.
►FOURGONNEAU Denis (†1626)
Prêtre et chanoine.
►HUTIN Jean († 1433)
Chanoine.
►LANGLOIS Pierre ( ?- ?)
Marchand et bourgeois de Paris et sa femme Martine Aubé († 1587).
►LE MIRE Nicole († 1503)
Chanoine, maitre es arts et bachelier en décret (droit canonique).
►LE ROUX Mathurin († 1578)
Chanoine.
►LE TONNEUR Nicole ( †1493)
Chanoine.
Frontispice de The Toast, poème de William King (1735).
►MAUROY Honoré de (1557-1629)
Conseiller-secrétaire du roi, il fut, notamment, auteur de Discours de la vie et faits héroïques de Monsieur de la Vallette admiral de France, Gouverneur & lieutenant général pour le Roy en Provence ; & de ce qui s'est passé dans ledit pays durant qu'il y a commandé. Comme aussi de ce qui avoit esté par luy faict auparavant en Piedmont & Dauphiné cependant que ledict Seigneur a eu la charge & gouvernement desdittes provinces, sous les règnes des deux Rois Henry III & Henry IIII (1624). Il fut un grand bienfaiteur de l’église. Un de ses fils († 1639) et son épouse, Bonne Le Liepvre († 1648) reposèrent avec lui
►MORHIER Simon (1390 – 1449/1456)
Chevalier et gentilhomme, il entra au service de la reine Isabeau de Bavière comme maître d'hôtel. Après la prise de Paris par Les Anglais (1420) ces derniers le nommèrent prévôt de Paris (1422). Il repoussa une attaque de Paris par les troupes de Jeanne d'Arc (1429). La même année, il subit l'attaque surprise des troupes fidèles à Charles VII lors de la Journée des Harengs dans les environs de Chartres. La « journée des Harengs » fut appelée ainsi en raison d'un convoi anglais qui transportait du poisson et autres victuailles destinés à être consommés pendant le carême. Les Français postaient des espions auprès des armées anglaises pour tenter de connaître leurs intentions. Un de ces hommes informa les Français de la sortie de 300 chariots de la ville de Chartres, convoi escorté par 1 500 Anglais sous le commandement de Jean Fastolf et de Simon Morhier. En 1432, il tenta vainement de reprendre Chartres.
En 1436, fait prisonnier par les troupes de Charles VII lors d'un engagement au pont de Charenton, il perdit sa charge de prévôt. Libéré en échange de deux de ses seigneuries, resté fidèle à Henri VI d'Angleterre, il fut nommé au Grand Conseil de Normandie et trésorier des finances de la Normandie et se fixa à Rouen (1438). Nommé capitaine de La Roche-Guyon, puis de Saint-Lô, il fut capturé, près de Dieppe, par des fidèles à Charles VII.
Bien que son épitaphe n’ait pas été conservée, il aurait bel et bien été inhumé en cette église près de sa seconde femme, Jeanne de Lagny.
►PISSEBEUF Antoine († 1627)
Prêtre, chanoine et aumônier du roi, mais aussi clerc et sonneur de la Chapelle de musique et oratoire du roi, le personnage semble avoir souvent fait preuve d’une humeur belliqueuse envers le chapitre de St-Honoré à propos de ses dépenses mais surtout des maisons claustrales que lui, Pissebeuf, occupa. De même, il se fit fort d’obtenir directement du pape la dignité de chantre de St-Honoré, prétention contre laquelle le chapitre mena un véritable combat. Entre opposition systématique à toute décision du chapitre et menaces diverses, seul l’âge finit par le désarmer…enfin presque.
►SARRED Deodet de († 1572)
Sous-diacre, conseiller et aumônier ordinaire du futur François II
►VALADE Jean (1710 – 1787)
Elève de Charles Antoine Coypel, il fut nommé peintre ordinaire du roi. Apprécié comme portraitiste, et aussi comme spécialiste du pastel, il gagna une importante clientèle de nobles et de bourgeois aisés. Outre le succès qu’il rencontra auprès de sa clientèle, ses quelques commandes royales et la rente viagère dont il était gratifié, Valade assit également son aisance financière grâce à la revente de tableaux, d’estampes et de curiosités « en chambre », c’est-à-dire officieusement. Il mourut dans son appartement du cloître St-Honoré.
Le Comte et la Comtesse de Durfort (1747)
–Musée Sainte-Croix de Poitiers
Portrait de M. Carré de Candé et ses fils (1770) château de Maisons (Yvelines)
Sources principales :
-Epitaphier du vieux Paris -Tome V
-Etat des parcelles au début du 17ème siècle : A. Berty et A. Lenoir. Histoire topographique et archéologique de l’ancien Paris, plan de restitution, Martin et Fontet (1880) BnF/Gallica
-Gravelot : Universalis en ligne : texte très inspiré de celui de Georges BRUNEL
-https://francearchives.gouv.fr/fr/facomponent/0f307068291f048924bbb57cd996d92d788e62c5
-https://wiki.geohistoricaldata.org/Clo%C3%AEtre_Saint-Honor%C3%A9_(Paris)_Parcelles_et_habitants_R%C3%A9volution-Empire
-https://wiki.geohistoricaldata.org/Clo%C3%AEtre_Saint-Honor%C3%A9_-_Parcelle_n%C2%B01_(Empire)
-Wikipédia
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