Installé à Paris en 1912, Lurçat étudia la peinture et la gravure. Il y rencontra Rainer Maria Rilke, Bourdelle et Elie Faure avec lesquels il fonda les Feuilles de Mai, une revue d'art à laquelle participaient ces célébrités et d’autres.
Influencé en peinture par les fauves, les cubistes puis par les surréalistes, il réalisa des fresques murales, des paysages sobres mettant en scène des personnages isolés. Il exposa deux fois à Zurich (1916, 1919).
Entre temps, il commença à s’intéresser sérieusement à la tapisserie en créant ses premiers cartons. En 1917, il fit réaliser son premier canevas par sa mère. Ce fut la révélation.
Tout en travaillant pour des décors et des costumes de théâtre de compagnies prestigieuses, Jean continuait à peindre et à dessiner avec une notoriété grandissante. Ses voyages en Italie, en Espagne, en Afrique du Nord et autres contrées furent autant d’extraordinaires sources d’inspiration.
Le rendez-vous avec la gloire date des années 1930. Ses cartons de tapisserie comportaient des symboles, souvent répétés (le coq, annonciateur de l'aurore, le soleil, symbole de vie), parfois originaux et sophistiqués. Ils étaient servis par un dessin stylisé, clair et dense où l'utilisation de l'élément végétal comme remplissage des motifs était déjà très fréquente.
Il créa un style très personnel laissant libre cours à son lyrisme, sur des échelles parfois monumentales, sans pour autant abandonner la peinture. Passionné par la vie, les hommes, leurs souffrances et leurs joies, son œuvre tissée célèbre les héros de la résistance, la liberté, le ciel, les astres, les animaux et ceux de son propre bestiaire. Ces innovations rénovèrent en profondeur le langage de la tapisserie.
En 1936, il sortit sa première tapisserie exécutée à la manufacture des Gobelins : Les Illusions d'Icare (3,30 × 3,50 m).
Vers 1937, il eut un véritable choc esthétique en découvrant L'Apocalypse à Angers, la plus grande tapisserie du monde tissée au 15ème siècle, qu'il considérait comme l'un des plus grands chefs-d'œuvre de l'art occidental. Enthousiasmé par l’extraordinaire puissance lyrique de l’œuvre et par l’économie de moyens employée pour sa réalisation (une vingtaine de nuances de couleurs seulement), elle le confirma dans l’idée que la tapisserie était un art monumental, qui doit voir et vivre grand, comme la fresque. Il en adopta la technique.
Les expositions se succédaient avec toujours le même succès. En 1939, il s'installa à Aubusson pour essayer de redonner vie à la tapisserie qui subissait une grave crise. Il mit au point un nouveau langage technique : carton numéroté, palette réduite, tissage robuste à large point. Les ateliers d’Aubusson tissèrent d’ailleurs une vingtaine de ses œuvres.