Dès 1525 le protestantisme commença à se répandre en France. Les premières victimes de la Religion Réformée datent du règne de François Ier.
Etablir les différences entre catholicisme et protestantisme n’est pas le propos de cet article.
Concernant le thème de ce site, il est surtout important de savoir l’opposition des deux religions sur leur attitude face à la mort.
La doctrine réformée rejette en effet l'idée du Purgatoire, la nécessité de messes pour les morts et la confession des derniers instants pour se ménager un accueil favorable dans l’au-delà : le comportement d’une vie honnête étant le seul blanc-seing recevable.
Jean Calvin recommandait des funérailles " honnêtes ", c'est-à-dire décentes, sans pratiques considérées comme superstitieuses : pas de pierre tombale, pas de prêche au cimetière, pas d'offrande…
Cela entraîna une fracture inévitable avec les catholiques qui pratiquaient un culte des morts très poussé et considèraient les cimetières comme des lieux sacrés.
Accrochés comme des berniques sur les rochers de leurs convictions, les deux confessions se lancèrent dans des violences réciproques dont les lieux de sépultures ne furent pas exempts : profanations et exhumations réciproques firent les beaux jours des Guerres de Religion.
Mais, au royaume de la fille aînée de l’Eglise, la coexistence sépulcrale ne pouvant perdurer, les conditions et lieux d’inhumations pour les protestants furent soumis à des mesures particulièrement discriminatoires. Ils allaient changer au gré des édits et de leur révocation.
En 1563, l’article 11 de l’Edit d’Amboise prescrivait déjà que, désormais, les Réformés seraient inhumés dans le cimetière de la paroisse qu’ils avaient habitée, mais nuitamment, sans suite, ni accompagnement. Ils ne pouvaient se faire enterrer qu’à partir d’une demi-heure après le coucher du soleil et jusqu’à une demi-heure avant son lever. La moindre dérogation à cette prescription était sujette à incidents sans aucune considération pour le défunt.
En 1568, au moins à Paris, la mesure fut atténuée en permettant l’accompagnement du convoi mortuaire par dix personnes. L’abjuration ouvrait à nouveau l’accès des cimetières paroissiaux à l’ensemble des
« nouveaux convertis ». Mais ces derniers y virent une insupportable contrainte et beaucoup ont retrouvé et proclamé, au moment de mourir, leur fidélité à leur ancienne foi.
Le 13 avril 1598, l’Edit de Nantes, signé par Henri IV avait mis fin aux Guerres de Religion.Si leurs conditions d'inhumations ne s'amélioraient pas, les Réformés avaient encore accès à des cimetières spécifiquement dédiés.
Jusque là, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce ne fut pas durant la période la plus sanglante de ces guerres que les protestants payèrent le plus lourd tribut d’humiliations pour leurs sépultures, mais un petit siècle plus tard, après la Révocation de l’Edit de Nantes (16 octobre 1685).
Déjà, avant la Révocation, les brimades contre les protestants avaient recommencé. En 1671, des individus surexcités contre eux avaient tenté, au cours d’une nuit, de brûler la porte de leur cimetière rue des Saints-Pères à Paris afin d’y pénétrer et de disperser les tombes.
A partir de la Révocation, les parpaillots se retrouvèrent interdits de cimetières ! Lorsqu’un d'entre eux mourait, le lieutenant de police délivrait à la famille un permis d’inhumer le défunt là…où elle le pourrait et toujours dans les mêmes conditions déjà citées.
A Paris, encore devaient-ils se sentir privilégiés de ne pas avoir leurs corps trainés sur une claie et jetés à la voirie comme ceux des relaps !
Des caves, des champs, des chantiers, des terrains vagues se transformèrent en autant de lieux de sépultures improbables que rien ne signalait à l’attention des passants. A cette situation effarante, s’ajoutait la chasse au convoi mortuaire très en vogue dans la capitale…