Refusé au Conservatoire au terme de deux années d'études, il signa son premier contrat en pour une tournée en Allemagne (1946). Des prestations plus tard, en 1952, dans une salle d’attente pour une audition, le hasard lui offrit une rencontre déterminante, celle avec Jean Poiret. Coup de foudre immédiat entre les deux hommes qui, au lieu de se dire bonjour, se lancèrent dans l’improvisation d’un sketch. Ce duo de complicité à l’humour décalé, nourrit à l’envie de s’amuser ensemble, fit longtemps les belles heures des cabarets parisiens.
1954 marqua ses débuts au cinéma dans Ah ! les belles bacchantes de Jean Loubignac. D’autres films suivirent, mais, sauf de rares exceptions, peu prisé par les grands metteurs en scène, il enchaina les comédies de série B tout en se consacrant au théâtre.
En lui donnant un rôle à sa mesure dans Le Viager (1972), Pierre Tchernia, avec lequel il collabora à plusieurs reprises, impulsa sa carrière. Mais, son véritable statut de vedette est notamment dû à Jean Poiret, auteur de La cage aux folles, qui, en 1973, fit appel à son ancien compère de scène pour reformer un couple dans une pièce dont le triomphe ne se démentira pas pendant plus de cinq ans. Un grand regret, sauf le fameux extrait de « la biscotte » que ce petit chef-d’œuvre du genre n’ai jamais été enregistré.
Pour autant, il n’interrompit pas sa carrière cinématographique qu’il mena dorénavant avec plus d’exigence que par le passé. Étrangleur de femmes dans L'Ibis rouge (1975), banquier véreux dans L'Argent des autres (1978), Michel Serrault semblait tourner le dos aux rôles comiques. Et pourtant ce fut bien son personnage d’Albin, dans l'adaptation à l'écran de La Cage aux folles d’Edouard Molinaro, qui lui valut le César de l'interprétation masculine (1979).
Alternant drames et comédies, il incarna de façon magistrale des personnages d’exception et/ou décalés pour lesquels il avait une prédilection : notable accusé du viol d’une enfant (Garde à Vue-1981) qui lui valut son deuxième César d’interprétation ; détective privé obsédé par la mort de sa fille (Mortelle randonnée-1982), douleur que l’acteur connut personnellement ; inspecteur désabusé et obsédé (On ne meurt que deux fois-1985) ; tueur en série opportuniste et vénal (Docteur Petiot-1990) ; magistrat solitaire et mélancolique (Nelly et Monsieur Arnaud-1995) qui lui rapporta son troisième César ; etc.
Autant de rôles qui mirent enfin en lumière l’étendue de son talent sur un registre dramatique, inquiétant.
Son retour à la comédie dans Le Bonheur est dans le pré (1995) de Chatiliez, fut salué par un immense succès.
Appelé par la nouvelle génération, Mathieu Kassovitz le transforma en tueur impitoyable dans Assassins (1996), tandis que Christian Carion lui faisait endosser le rôle d’un agriculteur bougon au grand cœur dans Une hirondelle a fait le printemps (2001).
Une autre rencontre qu’on ne peut passer sous silence tant elle fut importante, ce fut celle avec sa femme, Juanita Peyron (1923-2008), dite Nita, l’amour de sa vie épousé en 1958. Elle renonça à sa carrière d’actrice pour son foyer à la naissance de leur première fille, Caroline, qui trouva la mort dans un accident de voiture, en 1977, à l’âge de dix-neuf ans. Le travail et la foi permirent à l’acteur de ne pas sombrer.
Michel Serrault mourut des suites d’un cancer à Vasouy, petite commune associée à Honfleur, où il avait une résidence. D’abord inhumé au cimetière d’Honfleur, à l'initiative de sa fille cadette, Nathalie, sa dépouille fut transférée, en 2009, au cimetière ancien de Neuilly-sur-Seine où reposaient déjà Caroline et Nita qui ne lui survécut qu’un an.
Sur la tombe familiale, une simple caricature du site Magixl, clin d’œil au clown Serrault et à ses redoutables pitreries.