Avec le temps, leur enfantine et fraternelle complicité se transforma en amour platonique. Témoins de cette évolution de sentiment aux relents d’inceste, les parents décidèrent de les séparer.
Julien partit suivre des études à Coutances. Quant à Marguerite, elle n’avait pas quatorze ans lorsqu’elle épousa de force Jean Lefebvre, collecteur d’impôts de trente-deux ans son aîné. L’adolescente ne mit pas fin à ses jours mais sombra dans la mélancolie proche de la prostration. Mariage malheureux, s’il en fut.
Mais rien n’y fit. En dépit des mises en garde, de l’interdit, de la religion et de leur rang, le frère et la sœur se retrouvèrent et cédèrent à leur passion qui scandalisa leur entourage. Marguerite s’enfuit à Fougères où la rejoignit Julien se disant envoyé par leur père pour la ramener à Tourlaville. La jeune femme refusa, préférant se faire religieuse. Accompagnés de trois domestiques, ce fut alors une fuite éperdue de Fougères à Saint-Aignan (Eure), chez un oncle maternel, puis jusque Paris où ils espéraient sans doute vivre cachés.
Mais le mari criait vengeance et appelait à la réparation. Découvert, le couple fut arrêté le 8 septembre 1603, enfermé au Châtelet et traduit devant le Parlement qui, se montrant impitoyable, les soumit à la question ordinaire et extraordinaire.
Lors de son procès, Marguerite accusa Lefebvre de maltraitance l’obligeant à fuir par deux fois le toit conjugal. L’acharnement avec lequel son mari la poursuivit en justice, le soin qu’il prit à la faire priver de ses conventions matrimoniales, la facilité avec laquelle il se remaria peu après son exécution en ayant obtenu l’adjudication de la dot pour « réparation civile », démontrèrent davantage un sens pratique que de l’humanité…
Julien et Marguerite furent condamnés à mort pour inceste et adultère.
La veille de l’exécution leur père se jeta aux pieds d’Henri IV pour obtenir leur grâce à laquelle le roi aurait consenti si Marguerite n’avait pas été mariée. Mais elle l’était. Maigre consolation, il accorda une inhumation chrétienne à leurs corps au lieu qu’ils n’aillent pourrir dans la fosse du gibet de Montfaucon.
Le matin du 2 décembre 1603, Marguerite et Julien de Ravalet furent menés en place de Grève, décapités puis inhumés en l’église Saint-Jean-en Grève toute proche, à gauche du porche, à l’entrée de la chapelle de Communion. On raconte que jusqu’au début du 18ème siècle, on pouvait lire sur leur tombe, cette épitaphe : « Ci-gisent le frère et la sœur. Passant ne t'informe pas de la cause de leur mort, mais passe et prie Dieu pour leur âmes. »
En prison, Marguerite accoucha d’un enfant qui fut confié à ses parents.
L’église, supprimée en 1790 et vendue en 1800 fut démolie peu après. Les sépultures furent vidées de leurs ossements transportés aux Catacombes en janvier 1804.