C’est dans ce contexte que s’inscrit l’existence de Bach qui, après avoir été nommé organiste à Mühlhausen en 1707, fut une longue suite de brouilles avec ses employeurs et une perpétuelle pérégrination à travers le pays dans l’espoir de se voir un jour confié les fonctions très enviées de Kapellmeister (maître de chapelle).
En 1717, son rêve se concrétisa enfin à la cour du prince Leopold d’Anhalt-Köthen qui lui accorda en même temps ce poste et une vive amitié. Menant une vie laborieuse, il écrivit de nombreuses pièces pour orgue et clavecin. Il acheva ses six concertos brandebourgeois (1721) et rédigea le volet de son Clavier bien tempéré, œuvre qui jeta les bases de l’art de la fugue.
Pourtant, loin de se satisfaire de ce poste confortable, en 1723, il accepta de partir pour Leipzig où la place de cantor -maître de chapelle des églises de la ville- était vacante. Certes, la fonction était moins prestigieuse et soumise à l’autorité pointilleuse des édiles de la municipalité mais, astreint seulement à quelques heures de cours délivrées à des élèves et à la création d’une cantate chaque dimanche pour les églises, elle lui laissait beaucoup de temps pour composer.
Il demeura à Leipzig jusqu’à la fin de sa vie, s’acquittant non sans mal de sa tâche. En butte au contrôle rigoureux de sa production par la municipalité qui lui reprochait mille choses, à commencer par son caractère indépendant et ombrageux qui le faisait s’insurger contre les critiques, ses employeurs ne goûtaient guère une œuvre jugée sans ménagement. Mais quelle œuvre !
On estime à plus de trois cents le nombre de ses cantates écrites à Leipzig sans compter les œuvres maîtresses elles aussi mal accueillies.
Comme pour ses confrères, le métier de musicien participait de la vie religieuse et politique des Etats allemands. Plus encore, la musique était un langage pour prier Dieu et faire monter vers lui la ferveur des croyants. La foi de Bach était sans faille. Il y puisa toute son énergie pour composer de la musique sacrée et ses plus grands chefs-d’œuvre : Magnificat (1723), Passion selon saint Jean (1722) et Passion selon saint Matthieu (1729), des Motets (1723-1734), la Messe en si mineur (1733), l'Oratorio de Noël, 21 Chorals (1739), son second livre du Clavier bien tempéré (1740-1744), les Variations Goldberg (1742), l'Offrande musicale (1747), l'Art de la fugue (1746-1749), etc.
Il fut aussi honoré du titre de Hoftcompositeur à la cour royale de Saxe.
Aux tracas professionnels s’ajoutaient les soucis familiaux. Sur ses vingt enfants – sept avec sa première femme, treize avec la seconde- huit seulement survécurent. Son affliction fut aussi source d’inspiration. Quatre de ses fils se lancèrent sur la voie du courant pré-classique qui prenait alors le pas sur le Baroque.
Dès 1745 il fut menacé par la cécité. Malgré le soutien précieux de son épouse, Anna Magdalena, qui l’assistait et transcrivait sa musique, il lui fallait recouvrer la vue. En 1750, se fiant à un oculiste anglais de grande renommée, il accepta une opération qui se solda par un échec le rendant totalement aveugle. Sa santé s’altéra alors rapidement jusqu’à sa disparition d’une attaque d’apoplexie.
S’il avait porté la gloire de Dieu à son plus haut degré, son génie dut attendre longtemps avant d’être célébré. Ce n’est qu’au 19ème siècle que son œuvre fut réellement dévoilée au public quand, en 1829, Felix Mendelssohn ressuscita la Passion selon saint Matthieu qui suscita l’enthousiasme.
Trois jours après sa mort, Jean-Sébastien Bach fut inhumé dans une fosse commune du cimetière paroissial Saint-Jean de Leipzig où sa pierre tombale, si elle exista un jour, avait disparu au milieu du 19ème siècle. Seule la tradition indiquait l’emplacement de sa sépulture.