Ce furent bien ces évènements qui l’orientèrent vers une nouvelle conception de la poésie qu'il exposa dans les lettres dites du « Voyant » où le poète se fait voyant en trouvant l’inconnu par « un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens ». Le futur poète est comme « un voleur de feu ». Pour cela une méthode infaillible : s’encrapuler en se conduisant d’une manière scandaleuse tout en bouleversant le langage, le défigurer. L’essentiel de Rimbaud se trouve là, dans cette annonce de libération intime qui transforme la personne humaine et la parole. La poésie ne pouvait être qu’à ce prix.
Il n’avait pas vingt ans quand il écrivit les vers du Bateau ivre, du Dormeur du val, ou de Voyelles qui comptent parmi les plus célèbres de la poésie française. C’était avant que ce génie précoce ne cessât d’écrire des poèmes, à partir de 1875, pour entamer une nouvelle carrière, celle de l’aventure.
L’aventure, il l‘avait déjà connue sous une autre forme avec Paul Verlaine. En 1871, les poèmes qui lui avaient envoyés avaient enthousiasmé le parnassien qui l’invita à Paris. Choquant ceux qui l’approchaient par ses manières grossières, Verlaine ne l’en avait pas moins suivi lorsqu’il quitta la capitale en 1872. Entre la Belgique et l’Angleterre les deux amants vécurent une existence errante qui se termina en juillet 1873 lorsque Verlaine lui tira dessus, le blessant légèrement. Après une dernière rencontre en 1875, les deux hommes ne se revirent plus.
A partir de cette année, voyages et aventures exotiques le menèrent notamment à Chypre puis à Aden (Arabie), et à Harrar (Abyssinie) où il gérait simultanément un comptoir commercial. Il se fit un peu trafiquant d’armes, reconnut des régions jusque là inexplorées, etc.
En dix ans ses affaires étaient devenues prospères quand, atteint d’une tumeur au genou, il dut rentrer en France pour se soigner en mai 1891. Amputé d’une jambe à Marseille, victime d’un cancer généralisé, il y mourut quelques mois plus tard veillé par sa sœur cadette Isabelle.
Bien que brève, la densité de son œuvre poétique fait d'Arthur Rimbaud une des figures premières de la littérature française. L’ensemble de ses choix de vie participa aussi à forger son mythe.