Alors elle flâna à Montmartre où tout le monde la connaissait.
Elle vendit des fleurs, des cigarettes, des allumettes aux couples attablés aux cafés ou à ceux qui rentraient au Moulin Rouge pour applaudir Mistinguett.
En ce Paris des années 20, les rêves perdus ruisselant sur les pavés de la misère se déversaient facilement dans les verres d’alcool.
C’est ainsi que Louise, que du temps de sa gloire on appelait déjà « vide-bouteille », termina sa vie, coincée entre l’alcool, ses souvenirs et son chien Rigolo, seul et unique compagnon partageant son dénuement et son taudis de Saint-Ouen.
Un soir, mourante, elle se présenta à l'ancien Mirliton d'Aristide Bruant, devenu maison hospitalière, et demanda l'asile. On fit venir un prêtre à qui elle dit : «Mon père, est-ce que le Bon Dieu me pardonnera ? Y aura-t-il une place pour moi au ciel. C'est que je suis la Goulue...» Finalement elle mourut à l’hôpital Lariboisière et fut inhumée au cimetière de Pantin suivie par de rares témoins.
Mais le temps fit son œuvre et la Goulue devint une légende de Montmartre et de toute une époque.
Alors, quand en 1992, à la demande de son arrière-petits-fils, l’artiste Michel Souvais, ses restes furent transférés au cimetière de Montmartre, cette fois les médias, des personnalités ainsi que deux mille personnes assistèrent à cette cérémonie pour lui rendre hommage. Mieux valait tard que jamais.
Sans être la vedette du lieu, on s'arrête bien volontiers devant sa tombe.