Fort de ses premiers succès, il s’installa à Paris où, après avoir vécu de privations, il eut la chance de recevoir le prix de poésie de l’Académie française (1746) pour un poème que Voltaire s’amusa à vendre à la Cour procurant ainsi quelques écus à notre jeune auteur.
Séduit par le théâtre, il écrivit des tragédies au médiocre retentissement. Néanmoins, ayant su plaire à la marquise de Pompadour, il obtint d’elle une place de secrétaire des Bâtiments (1753).
Tout en travaillant d’arrache-pied, aimant à se répandre dans le monde où l’on appréciait son esprit, Marmontel acquit une renommée grandissante d’abord avec ses Contes moraux (1755-1765), puis avec son roman Bélisaire (1767), ouvrage qui lui valut une censure au prétexte qu’un chapitre vantait la tolérance religieuse. Passant pour une victime de l’arbitraire et défendu par les philosophes, son livre connut un véritable succès. Enfin avec Les Incas, ou la destruction de l’empire du Pérou (1777), s'il en était encore besoin, il confirma sa renommée.
Entre-temps, il fut élu à l’Académie française (1763), dont il devint le secrétaire perpétuel vingt ans plus tard en remplacement de D’Alembert. Toujours dans l’intervalle, il avait obtenu la charge d’historiographe de France (1771) et participé à l’Encyclopédie.
Proche de Necker, hostile à la Révolution, peu avant la chute de la royauté du 10 août 1792, il quitta Paris pour s’installer dans l’Eure, à Habloville (hameau de Saint-Aubin-les-Gaillon) où il vécut à l’écart de la vie politique n’acceptant que son élection au Conseil des Anciens (1797). Rangé sur les bancs des modérés et soupçonné de royalisme, il en fut proscrit et alla finir ses jours dans sa maison d’Habloville. Il y décéda alors qu’il achevait ses Mémoires.
Séduit par tous les genres, alliant sentimentalisme vertueux et libéralisme philosophique, il laissait une œuvre considérable touchant un large public. Il fut même l’auteur d’opéras dont la musique fut, entre autres, écrite par Rameau.
Selon ses vœux, Marmontel fut inhumé dans le jardin de sa propriété. Il reposait dans une simple crypte creusée au pied d’un mur et fermée par une grille où il aurait pu passer les siècles à l’abri du mur croulant et des charmilles envahissantes.
Mais en 1863, sa famille et quelques citoyens souhaitèrent que sa dépouille soit transférée au cimetière communal. C’était compter sans les deux agriculteurs à qui la maison avait été vendue et qui voyait dans ce transfert une dévalorisation de leur bien !
Le 6 ou 8 novembre 1866, après trois ans de tractations, grâce à une subvention, le cercueil fut déposé sur la charrette du laitier et prit le chemin du cimetière de Saint-Aubin-les-Gaillon. Et quel cercueil ! En plomb, moulé à la forme d’un corps humain, il pesait 380 kilos. Loin du faste qu’on espérait, les académiciens attendus s’étant excusés, la cérémonie fut des plus modestes.
Il fallut attendre le centenaire de sa mort (1899) pour qu’il soit l’objet d’une manifestation officielle en présence de Gaston Boissier, Secrétaire Perpétuel de l’Académie Française.
Son monument est orné d’un médaillon en bronze, œuvre de Malle, un sculpteur local.