Cette volonté, et peut-être son incapacité, de ne pas tricher lui imposèrent la forme de ses écrits, textes courts témoignant de son besoin de rendre comte au plus près de ses expériences intérieures. Aussi, tous ces livres -à l’exception d’Héliogabale ou l’Anarchiste couronné- consistent-ils en recueils d’articles, de poèmes en prose, de messages dénuées de toute préoccupation exclusivement esthétique.
Venu de Marseille à Paris, en 1924, pour devenir comédien, -il joua, entre autres, dans le fameux Napoléon d’Abel Gance (1927)- ce fut presque par hasard qu’il débuta son œuvre véritable dans laquelle il ne cessa de transcrire l’étrangeté qui habitait son esprit malade en tentant de sortir de cette forme de néant qui le bannissait du monde des humains. Son impossibilité de se libérer de son enfer psychique finit par le mener vers une rage perpétuelle lui dictant une attitude de révolte radicale contre tout. Et ce fut par le théâtre, dont il fut un théoricien, que « cet éternel témoin de soi-même » réclama le salut de son âme en fondant avec Roger Vitrac le Théâtre d’Alfred Jarry. Mais après un demi-échec, de plus en plus désespéré, Artaud sembla renoncer au théâtre.
Un séjour au Mexique (1936), où il fit l’expérience de drogues hallucinogènes auprès d’Indiens, lui inspira la narration de son voyage dans le surnaturel : Les Tarahumaras (1945).
Sa santé mentale déclinant de plus en plus, il fut interné de 1937 à 1946 dont à Rodez à partir de 1943. Dès sa sortie, il se consacra à l’écriture avec fébrilité alternant des moments supralucides et de phantasmes. Et c’est peut-être de cette lucidité supérieure mais effrayante que son redevables certains de ses derniers écrits, tels le poème étude sur Van Gogh (1947) ; Artaud le Mômo (1947), etc.
Dernier message au monde il se mit lui-même en spectacle lors d’une représentation au Vieux Colombier.
Sa quête véridique de connaissance de toute sa vie, il la cracha à la figure des universitaires et des cuistres de tous poils par une phrase lapidaire : « Je n’ai jamais rien étudié mais j’ai tout vécu, et cela m’a appris quelque chose. »
Antonin Artaud mourut d’un cancer à l’hôpital psychiatrique d’Ivry-sur-Seine où on le trouva un matin sans vie.Il fut d’abord inhumé dans cette commune avant d’être transféré, sur volonté de son neveu, Serge Malausséna, en avril 1975, au cimetière Saint-Pierre de Marseille sa ville natale. Ce tombeau, construit au frais de son neveu, qui avait aussi acheté la parcelle, se situe dans une des plus jolies pinèdes (nom donné à certaines des divisions) du lieu.
Contrairement à ce qu’affirme Odette Boulaméry dans son ouvrage Le cimetière Saint-Pierre de Marseille (comité du Vieux Marseille, 1999), Antonin repose bien dans ce caveau.