Elle n’était, littérairement, que Colette Willy, et la série des Claudine, ses premiers romans, n’étaient signés que du seul Willy, pseudonyme de son premier mari, l'infidèle Henry Gauthier-Villars (1859-1931) qui ne rêvait que de gloire et d’éclats mondains. D’ailleurs, sans la prévenir, celui-ci vendit les droits des Claudine. Elle ne lui pardonna jamais. Réduite à l’état de « nègre », la lutte pour faire reconnaître l’originalité et l’indépendance tant de la femme que de l’écrivaine ne lui fut pas facile.
Une fois séparée de la tutelle de Willy, elle se lança dans différentes expériences professionnelles (critique musical, journaliste, actrice, etc.) qui l’y menèrent.
Un second mariage, en 1912, avec le journaliste et homme politique Henry de Jouvenel (1876-1935), la plongea dans un nouveau monde, celui du cinéma et de la carrière de son nouvel époux dont elle eut une fille, Collette de Jouvenel. Elle continuait à écrire : Mitsou (1919), Chéri (1920), …
Et puis vint Le Blé en herbe (1923) qu’elle signa pour la première fois de son patronyme : l’écrivaine Colette à part entière venait enfin de naître sans pour autant lui apporter la fortune. Divorcée de Jouvenel (1925), elle rencontra Maurice Goudeket (1889-1977) qu’elle épousa en 1935.
Après avoir fréquenté Sainte-Maxime et Saint-Tropez -auquel elle consacra de nombreux essais ou romans : La Naissance du jour, Bella Vista, Prisons et paradis ou Journal à rebours- ce fut le retour à Paris en 1938 dans le fameux appartement du Palais Royal qui allait, douloureusement, participer à sa
« légende ». Immobilisée peu à peu par une arthrite de la hanche, elle continua d'écrire à partir des fenêtres, véritables portes ouvertes sur le monde. Gigi (1944) et bien d’autres y virent le jour. Ce fut sa dernière demeure.
Sans complaisance, et avec une étonnante lucidité, elle évoqua la maladie et la vieillesse dans L’Etoile Vesper (1946) et Le Fanal bleu (1949).
Avec on style épuré, élevé, et plus moderne qu’il n’y parait, elle se démarqua de ses contemporains parmi lesquels elle sut s’imposer.
Auteure reconnue, de grand officier de la Légion d’honneur, à la présidence de l’Académie Goncourt (1949), les honneurs ne cessèrent de pleuvoir jusqu’à sa mort.
La sensualité librement épanouie pour revendiquer les droits de la chair sur l'esprit, et ceux de la femme sur l'homme, qu’elle décrivait avec justesse, et qui fit la force de son écriture, comme sa bisexualité et ses divorces, lui avaient valu une réputation sulfureuse.
Si l’Eglise lui refusa un enterrement religieux, la République l'honora en lui organisant des obsèques nationales, faisant d’elle la première femme, et à ce jour la seule, à qui cet honneur ait été accordé.
Un catafalque fut dressé dans la cour du Palais Royal devant lequel défila une foule d’anonymes. A côté, un parterre composé de la famille, d’officiels, de ses amis des lettres et du théâtre, de familiers, etc. Les hommages rendus, dont celui de Roland Dorgelès, le cortège prit le chemin du cimetière du Père-Lachaise où elle fit inhumée. Dans la même tombe repose sa fille, Colette (1913-1981).