Néanmoins, étudiant à Vienne, membre de l’association étudiante « Albia », il y découvrit des auteurs antisémites, tel Eugen Dühring (1833-1921) et, par de nouveaux statuts, l’exclusion des Juifs de cette association.
Devant l’importance des discours antisémites, il s’interrogea sur d’éventuelles solutions. Mais, pour l’heure, bien que docteur en droit, il aspirait à une carrière d’écrivain. Après avoir écrit quelques pièces de théâtre, il devint journaliste pour le plus prestigieux quotidien viennois, la Neue Freie Presse qui l'envoya comme correspondant à Paris (1891-1896). Chargé de couvrir l’Affaire Dreyfus, il fut profondément choqué par les campagnes antijuives dans cette France qui fut la première à proclamer l’égalité des Juifs. Ce fut pour lui un coup de tonnerre, comme un électrochoc : l’assimilation lui semblait dorénavant irréalisable et un juif serait toujours un étranger.
Pour élaborer son programme sioniste, il puisa d’abord dans son imaginaire personnel puis, en 1896, publia un ouvrage rassemblant ses idées : L’Etat Juif (Der Judenstaat), suivi d’Altneuland. Seul un état-nation apporterait une solution à la « question juive ».
Au bout du compte, son grand mérite historique ne fut peut-être pas l’invention du sionisme, ni la découverte du pays où les Juifs pourraient fonder leur état, mais davantage à tirer avec lucidité les conséquences de la perversion de la culture européenne par l’antisémitisme.
Une fois ses ouvrages publiés, il se lança dans une intense activité politique pour mettre en place son projet. Il profita de ses nombreux contacts pour diffuser ses idées et trouver des fonds auprès des milieux financiers juifs. Mais ceux-ci, ne croyant pas en la création d’un Etat juif, lui refusèrent leur soutien.
Loin d’être découragé, il poursuivit son action et organisa le premier Congrès sioniste mondial à Bâle (29-31 août 1897). Le Congrès donna naissance à l’Organisation sioniste mondiale dont il fut élu président.
Le but de l’Organisation était clair : établir un Etat juif répondant uniquement à un souci de sécurité et d’émancipation du monde juif. Il s’agissait d’un sionisme laïc et étranger à toute idée messianique ou biblique.
Le mouvement se structurant rapidement, Herzl fonda la même année le journal Die Welt son organe officiel. Dans la foulée, il voulait aussi que son mouvement sioniste prenne une dimension internationale de façon à mobiliser l’ensemble de la communauté juive.
Bien que proposant l’Argentine ou l’Afrique orientale comme terre d’accueil, la Palestine avait tout de même sa préférence. Mais l’immigration devait s’y faire de façon officielle et passer d’abord par une reconnaissance internationale préalable du pays.
Après avoir vainement tenté d’obtenir des concessions de l’empire ottoman, dont la Palestine faisait alors partie, il consacra le reste de sa vie à des actions diplomatiques sans guère de résultats, sauf la possibilité d’un foyer national juif en Ouganda concédé par le ministre britannique des Colonies. Un foyer en Ouganda plutôt que pas du foyer du tout l’idée lui convenait, mais elle fut rejetée lors du VIe Congrès en août 1903, puis définitivement oubliée après sa mort. Il est vrai que son projet était loin de faire l’unanimité dans une communauté éclatée et très disparate.
S’il n’avait pas réussi à obtenir l’accord international dont il rêvait pour son projet, il avait réussi à faire du sionisme un mouvement organisé et reconnu. Au lendemain du Congrès de 1897, il avait écrit : « A Bâle, j’ai créé l’Etat juif. Si je disais cela aujourd’hui publiquement, un rire universel serait la réponse. Dans cinq ans peut-être, dans cinquante sûrement, tout le monde comprendra ». En 1948, l'utopie de Herzl devenait réalité : l’Etat d’Israël était créé.
Theodor Herzl mourut à Edlach an der Rax (Autriche), et fut inhumé dans la tombe de ses parents au cimetière Döbling de Vienne.
Si un jour existait l’Etat indépendant que le peuple juif aurait fondé en Palestine, il souhaitait y être inhumé. Après de nombreuses tergiversations, son vœu se réalisa le 17 août 1949. Depuis, la nécropole où il repose, et qui était alors toute récente, porte son nom : cimetière du Mont Herzl à Jérusalem.
Son statut de visionnaire de l’Etat juif lui vaut de reposer seul et à l’écart des autres personnalités à une extrémité de l’esplanade qui mène à sa tombe située légèrement en hauteur. L’esplanade fut agrandie pour célébrer la première grande cérémonie du Jour de l'Indépendance en 1950.