Depuis des années Jean Cottereau, le plus célèbre des quatre frères Cottereau, tirait ses ressources du trafic du sel. Faux-saunier il était, et faux-saunier il serait bien resté si la Révolution n’avait pas supprimé la gabelle le privant de ses ressources.
Or, en 1786 grâce à l’intercession auprès du roi de Philippe de la Trémoille, prince de Talmont, Jean avait évité la corde qui devait le pendre pour avoir tué un commis de l’administration chargé du recouvrement des taxes. De ce jour, fidèle dans ses amitiés comme il le fut à ses convictions, Jean voua aux deux hommes une reconnaissance sans faille.
Jean n’avait pas attendu la mort de Louis XVI pour mettre à profit son courage, son audace extraordinaire et son expérience de contrebandier habitué à se jouer des gabelous. Contacté par le marquis de la Rouërie en 1792, Jean Cottereau prit toute son ampleur et rentra dans l’Histoire sous le nom de Jean Chouan en référence au hululement du chat-huant qu’il utilisait comme cri de ralliement.
L’exaspération en Bretagne fut à son comble en 1793 quand la Convention décréta la levée en masse de milliers d’hommes pour former une armée nationale.
En représailles les Bleus firent des otages parmi lesquels la famille Cottereau et ses proches. La haine et la rage de Jean n’en furent que décupler. Avec sa troupe, il attisa et répandit la rébellion qu’il mena sous forme de guérilla qui tint longtemps les républicains en échec.
Avec ses frères, bondissant d’un exploit à un autre, Jean restait insaisissable. Cela ne pouvait durer. Sa mère, qui de son village était allée à pied jusqu’à Versailles pour implorer sa grâce en 1786, avait été tuée au Mans.
Peu après c’était au tour de son frère François de mourir d’une blessure infectée. Puis il y eut ses deux sœurs cadettes, âgées de dix-huit et quinze ans, guillotinées à Laval pour espionnage, et enfin Pierre son frère aîné, le timide, le bègue, guillotiné lui aussi à Laval.
Funeste printemps 1794 qui laissa Jean accablé de désespoir. Il ne traîna pas longtemps sa peine. Le 27 juillet suivant, à la métairie de la Babinière, près de son village de Saint-Ouen-des-Toits, il tombait sous les balles des Bleus.
En attendant mieux, son corps fut inhumé à deux ou trois kilomètres de là, quelque part dans le bois de Misedon qui lui avait si souvent servi de refuge. La paix tardant à revenir, le temps s’écoula. La croix qui marquait sa tombe disparut et les chamboulements du bois effacèrent définitivement toute possibilité de retrouver sa dépouille.
Jusqu’en 1804, les chouans continuèrent plus ou moins leur action. Elle ne devait véritablement se finir qu’avec l’exécution d’un autre grand nom de la chouannerie : Georges Cadoudal.