Grâce à la protection de Joséphine de Beauharnais, on lui offrit une seconde chance un mois plus tard dans le rôle de Phèdre au Théâtre-Français. Et là, sa verve, sa chaleur, son instinct, sa voix flexible et pénétrante, son accent passionné qui la transfigurait fit oublier son faciès ingrat. On raconte que Talma, qui partageait l’affiche, se surpassa tant il fut électrisé par sa nouvelle partenaire.
Ce fut vite un triomphe au point que le public exigea qu’elle soit couronnée sur scène par ses collègues qui ne lui pardonnèrent pas en général et Mlle George en particulier. Ayant accordé ses faveurs à Bonaparte, celui-ci fit en sorte qu’elle soit reçue à la Comédie française en 1804, en même temps que Mlle George ! La rivalité déjà bien entamée entre les deux femmes fut d’une violence inouïe et ne prit fin que le 30 avril 1808 lorsque Mlle George s’enfuit en Russie, laissant ainsi la place à la Duchenois.
Forte de son succès, elle en devint capricieuse, tyrannisant ses camarades et la direction du théâtre. Aucune actrice ne prit autant de congés qu’elle en dépit des contestations du comité de direction de la Comédie, si bien que son départ le 1er novembre 1829 et sa représentation de retraite le 9 janvier 1832 ne causèrent aucun regret. D’ailleurs, depuis quelques temps, son talent et son physique avaient subi de sérieuses dégradations.
On la revit encore une fois sur la scène de l’Opéra, le 30 mai 1833, pour une représentation au bénéfice de Marie Dorval qui se révéla catastrophique. Minée par une maladie chronique, elle ne fit plus que dépérir pour s’éteindre dans son petit hôtel de la rue de la Tour-des-Dames, assistée dans ses derniers moments par Mgr de Quélen archevêque de Paris.
Peut-être en partie à cause de sa générosité passée, Mlle Duchesnois mourut dans un état voisin de la gêne. Son enterrement au Père-Lachaise fut d’une grande tristesse. Il semblait que tout le monde l’eût oubliée. Il ne fut guère que Valenciennes pour lui rendre de vrais honneurs..
Son monument fut élevé grâce à la contribution de la famille royale, la Comédie-Française, de la ville de Paris et des villes de Lille, Valenciennes, Douai, Dunkerque, Avesnes, Bordeaux, Nantes, ainsi que de la Société du Nord.
Le haut-relief de la tombe, oeuvre de Lemaire, symbolise la Tragédie.