Interprète de grands rôles : Emilie dans Cinna, Phèdre dans la pièce éponyme, Hermione dans Andromaque, la critique la couvrait de louanges.
Lucien Bonaparte, en grand connaisseur, la fit sa maîtresse. Remplacé par le prince Paul Sapiéha, en 1803, elle céda aux avances de Bonaparte qu’elle agaça par ses bavardages où elle évoquait leur liaison dont elle sut entretenir la légende. Et pendant qu’elle continuait à interpréter les grands rôles, sa vie amoureuse se poursuivait avec le financier Ouvrard où encore un obscur auteur dramatique Jean-Michel Souriguère.
En 1808, fuyant ses créanciers, elle se rendit en Russie où le comte de Beckendorff avait promis de l’épouser.
Très bien accueillie à Saint-Pétersbourg par le tsar Alexandre Ier et la noblesse russe, elle joua au Théâtre Impérial, connut un grand succès. A défaut d’épouser un comte, elle partagea le lit impérial…
Après la désastreuse retraite des Français de Russie, elle se rendit en Suède auprès de Bernadotte. En 1813, elle put enfin rentrer en France où, grâce à Napoléon et à Talma, elle renoua avec la Comédie française et le succès A vingt-sept ans, elle rayonnait de beauté.
Ne cachant pas son bonapartisme sous la Restauration, orgueilleuse, autoritaire et indisciplinée elle fut exclue de la Comédie française pour cause de congés trop longs en 1817.
Elle partit en tournée à l’étranger dont elle revint pour une autre en France avant d’intégrer le théâtre de l’Odéon. Elle devint la maîtresse de son directeur Charles-Jean Harel (1790 – 1846) ex-préfet impérial. Abandonnant les grands classiques pour jouer les drames romantiques, sans effort elle faisait pleurer, elle faisait applaudir.
Quand Harel, atteint de folie, décéda en 1846, Mlle George avait déjà beaucoup perdu de ses grâces d’antan au profit d’une grosseur effrayante que n’arrangeait pas une évidente décrépitude. Le public ne voulait plus d’elle. Démarche alourdie, visage empâté, ses traits perdirent leur noblesse et leur pureté. "C'est assez, cétacé." se moquaient certains journaux. Humiliée et brisée, elle quitta les planches. Elle se retira à Passy et dut se contenter d’une pension que Napoléon III alloua à « la vieille maîtresse de Bonaparte ». Lors de ses promenades dans le quartier, les gamins se moquaient d'elle et l'appellaient "La Baleine". Elle mourut dune congestion pulmonaire.
Nécessiteuse et oubliée son convoi mortuaire fut payé grâce à une collecte faite dans les coulisses des théâtres parisiens. La pauvre femme, vêtue de son costume de Rodogune, de Pierre Corneille, que lui avait offert le tsar Alexandre Ier, fut inhumée dans la tombe de son père où, depuis vingt et un an, l’attendait son cher Harel.