Organiste de l'église Saint-Nicaise de Rouen et de Notre-Dame de Caen, dans les années 1920, il commença à écrire de la musique avec notamment Les Pochades (1923), œuvre pour piano, et Le Bal des pendus (1929), poème symphonique qui connut un beau succès. Plus tard, il ajouta deux suites Ophélie (1931) et Marine (1933) : l'ensemble de cette œuvre porta alors le titre de Les Illuminations, triptyque symphonique.
Homme de communication, "habile, mais conciliant; volontaire, mais souple; obstiné, mais patient", parallèlement à sa carrière de compositeur, il débuta comme directeur musical à Radio Tour Eiffel en 1935, puis passa à Radio Paris et à la Radiodiffusion française jusqu'en 1945. Grâce à lui, on put enfin entendre pour la première fois dans son intégralité les œuvres de Gabriel Fauré, de Claude Debussy et de Maurice Ravel. Par la suite il occupa les fonctions de directeur artistique de Radio Monte-Carlo durant quatre ans.
Il fut également l’un des fondateurs d’une société de musique contemporaine, " Triton ", qui eut une grande influence au cours de la période d’avant-guerre.
Mais cet auteur de nombreuses œuvres aux genres différents était aussi un homme théâtre-né. En 1949, il devint directeur de l'Opéra-comique avant de prendre la direction de l'Opéra de Paris en 1952 à la tête duquel il resta jusqu’en 1969.
Elu membre de l'Académie des Beaux-Arts en 1959, Grand Prix de la SACD en 1964, il fut également un président très actif à la tête de la Fondation Maurice Ravel.
Amateur d'oeuvres très diverses, avec son instinct d'une musique vivante, dramatique et surtout sincère, Bondeville était exaspéré par le fait de vouloir à tout prix que toute œuvre nouvelle apporte du nouveau : il déclarait : "la maladie de notre temps est de rechercher à tout prix l'originalité. La musique pâtit particulièrement de cette manie."
Cependant, il aimait la remise en question dans les formes traditionnelles, mais seulement lorsqu'elle provenait d'un génie, et non d'une simple décision prise par des quidams réunis autour d'une table de travail !
Humain et conciliant, il fut le conseiller compétent et écouté de bien des personnes. D'un avis éclairé, ayant toujours exercé dans le respect de la tradition, sa nature très sociable le faisait apprécier de tous.
Grand musicien un peu trop oublié, au point de ne pas avoir trouvé le moindre extrait d’une de ses compositions pour illustrer cet article, un hommage, même modeste à toutes ses activités valait la peine d'être fait.
A retenir et peut-être à méditer, ce qu’il pensait des méfaits de la mode, notamment le choix des œuvres de concerts et l’attitude du public : " Par crainte de méconnaître un chef-d’œuvre, on porte tout aux nues, et l’auditeur applaudit de ce que, dans son for intérieur, il déteste".
Emmanuel Bondeville fut inhumé au cimetière du Père-Lachaise où sa tombe semble elle aussi oubliée de tous. Mes remerciements à Eric Meunier pour m’en avoir rappelé l’existence.