Contrairement à ce que l’on pourrait penser, si les contes firent passer Charles Perrault à la postérité, ils furent étrangers à sa célébrité de son vivant puisqu’ils ne furent publiés que six ans avant sa mort.
Outre ses fonctions, qui le rendaient incontournable à bien des égards, Charles tout en continuant son œuvre de panégyrique officiel, esquissa, derrière l’anecdote de faits littéraires, une réflexion critique sur les fondements culturels de la société. C’était le prélude à la fameuse querelle qu’il allait déclencher : celle des Anciens et des Modernes qui contribua à remettre en cause la politique culturelle royale et qui l’opposa à La Fontaine, Boileau et La Bruyère. Nous étions en 1687 et elle dura sept ans !
En conséquence de ses positions, ses relations avec Colbert se rafraîchirent entraînant la suppression progressive de ses charges jusqu’à être exclu de la Petite Académie par Louvois dont il ne resta que la direction. A cinquante-cinq ans Charles se retrouvait de facto dans une retraite quasi-totale !
Et les contes dans tout cela ? Toujours pas.
Veuf depuis 1678, Charles se consacra alors à l’éducation de ses enfants et surtout à la rédaction d’écrits qui attisèrent les braises de la querelle jusqu’à ce qu’enfin elle se solde par la réconciliation publique des protagonistes en 1694.
Ce ne fut donc qu’en 1697, alors qu’il était déjà âgé de soixante-neuf ans que Charles fit paraître la première édition du recueil Les Contes de ma mère l'Oye sous le nom de son troisième fils, Pierre Darmancour. Leur publication intervint à une époque où ce genre de littérature connut une mode éphémère chez les adultes des milieux bourgeois et aristocratiques. Paradoxalement, aucune œuvre de ce type n'existait encore pour les enfants qui se contentaient des récits colportés par les nourrices et les bonnes d'enfants venues de la campagne dont s'inspira très probablement Charles, même s'il ne cita jamais ses sources.