Il poursuivit via une carrière italienne en allant se perdre dans des œuvres peu exaltantes. Puis plus rien. Excepté Godard, aucun des réalisateurs français ne trouvait grâce à ses yeux.
Insatisfait par les cinéastes qu’il observait sur les plateaux, il mit quinze ans à passer de l'autre côté de la caméra: ce fut en 1970, pour Les Amis.
Sa rencontre avec Robert Bresson, alors en marge, fut déterminante. Esthétiquement, la paire se soudait autour de quelques traits homogènes de ce que devait être idéalement le «cinématographe»: trouées de silence, jeu atonal des modèles, composition des plans aérée et ciselante, amour des beiges, des couleurs pâles, nécessité d'une durée attentive à capter le mystère de personnages jetés au monde, en quête d'origines.
Les huit films qu'il réalisa modelèrent le matériau de l'enfance irréconciliable avec la société ennemie des adultes. Car jamais ses blessures d’enfant se refermèrent : « Rage, révolte, rébellion, je ne sais pas faire autre chose», confia-t-il à Libération. Emporté et excessif, dans la «profession», son nom suscitait respect mais aussi silence gêné.
L’acteur Blain était devenu un cinéaste exigeant, maudit, méticuleux, d'une belle austérité, presque d'un autre temps. Lancé comme le James Dean français, il ne parvint jamais au mythe et ses films, bien qu’intéressants, ne rencontrèrent jamais la faveur du public.
Hanté par la mort, comme une signature testamentaire son dernier film, Ainsi soit-il, obtint le Léopard d’Or au Festival de Locarno en 2000. Il mourut d’un cancer quelques mois plus tard.
Gérard Blain fut inhumé au cimetière de Saint-Cloud. Sur sa tombe, le mot de la fin…