Très influencé par son père, les idées de ce dernier formèrent le canevas du fils brillant politicien en devenir : amnistie pleine et entière, liberté de réunion, liberté d'association, de conscience, séparation de l'Église et de l'État, instruction gratuite, laïque et obligatoire, réforme des impôts pour favoriser les libres associations des travailleurs, leur légitime accès au capital et à la propriété, etc.
Il avait aussi hérité de lui, victime de l'Empire, la profonde connaissance du mal que peut faire à un pays tout régime qui n'est pas démocratique.
Formidable orateur, proche du président en place, Raymond Poincaré , comptant sur de nombreux appuis, il songeait depuis longtemps à la magistrature suprême. Le vote préparatoire à l'Assemblée nationale, pour l'élection présidentielle de 1920 allait être l’occasion. Restait à battre un adversaire, et pas des moindres, le président du Conseil Georges Clemenceau auquel il s’opposait depuis des années. Fédérant les ennemis du Tigre, il remporta l’élection. Des années auparavant, Deschanel, accusant Clémenceau d’être compromis dans le scandale de Panama, les deux hommes s’étaient retrouvés sur le pré, l’épée à la main, duel que Clémenceau avait gagné.
Mais ce n’est pas pour son programme, ses actions menées que Paul Deschanel resta dans les mémoires. Peu habitué au protocole, on le surprit aussi bientôt à donner des signes de fatigue en public.
Le 23 mai 1920, le président était à bord d’un train le menant à Montbrison quand aux alentours de minuit, pris d’un sentiment d’étouffement, il ouvrit la fenêtre de son compartiment, se pencha et bascula sur les rails à Mignerette (Loiret). Heureusement, très ralenti par des travaux, le train roulait lentement.
Et le président de la République de se retrouver en pyjama, blessé et hébété et récupéré par un cheminot qui se demandait s’il n’a pas à faire à un fou ou à un ivrogne !