Malgré ses échecs, on l’avait préféré à Latouche-Tréville pour commander l’armada envoyée en Amérique où il rencontra son unique victoire : le 5 septembre 1781, il obligea la flotte anglaise à se retirer de la baie de Chesapeake, l’empêchant de secourir le général Cornwallis qui dut signer sa capitulation.
La guerre navale se poursuivit dans les Antilles. La campagne de 1782, entre les flottes britannique et française, sonna le glas de l’amiral lors de la bataille de Saintes . Un vrai désastre qui offrit une victoire écrasante aux Anglais. Emmené en Angleterre, où il fut traité avec honneur, la suite est moins glorieuse.
De retour en France, il publia un mémoire justificatif dans lequel il accusait ses officiers Bougainville et Vaudreuil de ne pas être venus à son secours. Un conseil de guerre tenu à Lorient en 1784 l’entendit et l’acquitta. Acquitté certes, mais disgracié il dut quitter la Cour. Sa carrière était brisée. Il se retira dans son château de Tilly (Yvelines) où il mourut sans avoir pu retrouver la faveur royale.
Celui à qui Washington avait dit « vous avez été l'arbitre de la guerre » s'enfonça alors peu à peu dans l'oubli, sa mémoire entachée par la défaite des Saintes et la malheureuse polémique qui suivit. Aucun navire de guerre français ne porta son nom au 19ème siècle, et il fallut attendre un historien américain pour éditer sa première biographie. La marine nationale baptisa alors un de ses navires le De Grasse peu avant la Seconde Guerre mondiale, rejoignant l'US Navy qui donne régulièrement le nom du vice-amiral français à l'une de ses grandes unités.
L’homme ne manquait pas de courage mais était, hélas, dépourvu des qualités manœuvrières nécessaires au commandement d’une escadre.
Le vice-amiral de Grasse fut inhumé en l’église Saint-Roch où il ne reste rien de sa tombe. Néanmoins une plaque commémorative rappelle sa présence en ce lieu.
Son cœur fut déposé dans une urne en l’église de Tilly. Au cours d'une réfection du sol de l’édifice, l'urne fut retrouvée et solennellement transférée, en avril 1923, dans la sépulture de sa troisième épouse, Christine-Marie-Delphine Lazare de Cibon dans je ne sais quel endroit...