Désormais, par son talent de compositeur, ses auteurs d’envergure et son expérience de la scène, tout alla très vite. Avec son sens du swing et son énergie électrique, lors de son passage à l’Olympia en 1955, l’hystérie qu’il déclencha fut telle qu’une partie de la salle fut saccagée. L’évènement, largement relayé par la presse, lui conféra son surnom de « Monsieur 100.000 volts », marqua vraiment les grands débuts de sa carrière et son attachement au mythique Olympia dont il reste l'emblème avec un record de plus de trente passages.
Sa fougue, sa jeunesse, sa voix chaleureuse et son tempérament méditerranéen furent autant d'atouts pour établir une complicité avec le public qui ne se démentit jamais. Commença, alors le marathon des galas.
Les années 60, et l’époque « yéyé » avec l’arrivée du rock'n'roll dans le paysage musical français qui mit au placard plus d’un chanteur de la précédente génération, ne le déstabilisa pas. Il écrivit pour ces jeunes, et lui-même enchaîna des succès devenus des grands classiques du répertoire : Et maintenant (1961) –reprise plus de cent fois par des interprètes américains (Presley, Sinatra, James Brown, Dylan, Nina Simone, etc.) et qui, sous le titre « What now my love », fit le tour du monde -, Dimanche à Orly (1963), Nathalie (1964), L'Orange (1964), Quand il est mort le poète (1965), L'important c'est la rose (1967), …, lui valurent des records de vente de disques.
Artiste majeur de la chanson française, sa popularité traversa la décennie 70 avec le même enthousiasme. Il signa de nouveaux tubes comme La Solitude ça n’existe pas.
Démarrées en trombe avec Désirée, les années 1980 se poursuivirent au rythme fou de tournées internationales - notamment aux Etats-Unis où il créa, dans la foulée, une comédie musicale « Madame Roza » qui triompha à Broadway-, et encore des récitals et l’Olympia…
Sa puissance scénique ne perdait rien de son incroyable énergie. Et pourtant. A partir de 1991, la mort de sa mère et celle d’Yves Montand accentuèrent son découragement dû, en partie, au succès qui s’émoussait et avec lequel il ne renouait pas. Et puis, grand fumeur, le cancer du poumon s’était invité dans sa vie effrénée, maladie qu’il évoquait dans la chanson Faut faire avec, extraite de son dernier album éponyme (1999).
Le jour de ses obsèques, alors que le corbillard passait sur le Boulevard des Capucines pour se rendre à l'église de la Madeleine, le célèbre fronton de l'Olympia affichait en lettres de feu Salut Gilbert Bécaud.
Puis, il fut inhumé au cimetière du Père-Lachaise. Et le rideau tomba sur son souvenir davantage que sur sa tombe toujours bien entretenue et fleurie. Car, malgré son immense popularité, sa mémoire s’effaça rapidement, au point que, face à cette amnésie estimée injuste par certains, il fallut attendre quinze ans pour qu’il revienne, un peu, sur le devant de la scène télévisuelle en 2016.