Surnommée « la déesse de la beauté et de la musique » par Voltaire, belle, très cultivée, d’une gaité naturelle, le pouvoir de séduction de Louise attirait toutes les sympathies. Pendant qu’elle participait aux écrits de son mari et qu’elle travaillait à ses propres projets, sur les femmes ou l’amitié, venaient à elle, le plus naturellement du monde, des gens de lettres, des philosophes, des savants et des grands noms de la noblesse au milieu desquels, Louise, hôtesse louée par tous, animait les conversations, menait les débats et élevait les discussions. Très réputé son salon fut l’un des plus brillants de l’époque des Lumières. Rousseau, qu’elle engagea comme secrétaire, en tomba éperdument amoureux. Il participa à la réalisation de son encyclopédie du deuxième sexe qui devait démontrer une fois pour toute l’égalité entre les hommes et les femmes. Travail considérable ne négligeant aucune source pouvant argumenter et prouver de façon convaincante que l’inégalité entre les sexes n’était due qu’à l’oppression masculine.
Mais après les années heureuses vinrent les plus sombres. Son fils Jacques-Armand Dupin, dit Dupin de Chenonceaux (1727-1767) se révéla être un mauvais sujet et un joueur invétéré au point de contraindre son père à vendre des biens. Enfermé sous prétexte de folie, il fut expatrié à l’île Maurice où il décéda de la fièvre jaune. Son époux mourut, puis son petit-fils.
A la Révolution, plutôt qu’émigrer, au début de la Terreur, avec des membres de sa famille, elle se retira dans son château de Chenonceau qu’elle réussit à préserver en autorisant les révolutionnaires à en brûler tous les symboles de la royauté. Dans ce refuge, lui parvenaient les terribles évènements de Paris, arrestations et morts comme celle de son neveu, Pierre Armand Vallet de Villeneuve, qui, condamné à mort par le Tribunal révolutionnaire, préféra le suicide à la guillotine.
Agée quatre-vingt-treize ans, la dame de Chenonceau y termina sa vie dans une grande solitude.
« J'entends et je veux, après ce qu'on croit la mort et le terme ordinaire pour s'en assurer, être gardée au moins quarante-huit heures de plus ; rester au moment où mes yeux se fermeront placée dans mon lit, visage découvert comme si j'y étais vivante […] De quelque maladie ou accident que je meure, je ne veux point qu'on en cherche la cause […] Je ne veux être touchée et ensevelie que par les femmes seules de ma maison et je désigne Louise Morillon, Henriette Bossé femme Henry et Marie-Anne Chavigny pour me rendre ce dernier service […] Je ne veux absolument être enfermée que dans une boîte de sapin et je charge mes successeurs, quelque part où je meure, de me faire transporter à Chenonceau avec la plus grande simplicité et me placer dans le lieu que je ferai marquer. »
Ses dernières volontés furent respectées. Elle fut inhumée à l’endroit désigné, à l'ombre des grands arbres du parc de Francueil, où ses petits-neveux lui érigèrent un tombeau. Sur un côté on peut lire cette inscription : Aux vertus, au génie, aux grâces.
Cette amie des encyclopédistes, et auteure féministe, était l’arrière-grand-mère par alliance de George Sand. Dans son Traité de l’Amitié, qu’elle avait écrit à vingt ans, on notera cette phrase qu’elle fit sienne toute sa vie : « L’esprit délibère et le cœur conclut ».