Comme un fruit naturel du terroir, la farce, qui brilla surtout au théâtre et qui enfanta Molière, se retrouve dans une foule de coutumes qui traversèrent les siècles.
Longtemps ce genre vécut de personnalités. Quand venait le grand jour du Mardi-Gras, la basoche, qui pendant de nombreuses années en conserva le monopole, s’emparait alors de l’actualité scandaleuse du moment pour égayer la foule. Sous le couvert de la folie, elle assénait de bonnes et dures vérités. Tout ce qui pouvait être l’objet du ridicule était saisi au passage et joué à l’impromptu par des acteurs impitoyables. Les farceurs de l'ancien théâtre s'accoutumèrent fort aisément à ne pas agir d'une autre manière.
Pendant près de trois siècles, du 14ème à la fin du 16ème siècle, les farces dramatiques furent écrites en vers. Cette forme, qui se prêtait mal à l'improvisation indispensable pour épingler l’actualité du jour, tomba peu à peu en désuétude.
La prose, convenant mieux à l’à propos de la malice, se substitua donc aux vers. Pour satisfaire un public avide de moqueries, les comédiens durent se montrer aussi talentueux dans leurs jeux que dans l’art d’improviser.
Les anciennes farces furent adaptées dans un style plus compréhensible. Celles importées d'Italie devinrent le canevas sur lequel se multiplièrent les broderies de circonstance. Tout farceur intelligent se devait non seulement de rendre avec plus ou moins de supériorité les œuvres des écrivains mais aussi être lui-même un peu auteur.
Les moyens de communication limités de l’époque faisaient des foires les lieux privilégiés d’échanges et de rencontres. Leurs ouvertures, correspondant en général à quelque grande fête de l’Église, se faisaient avec des cérémonies spectaculaires et devenaient les scènes idéales pour les facéties de certains farceurs, tel Gautier-Guarguille, qui régalaient le public en caricaturant des détails de mœurs, de coutumes et des personnages connus.
Gros-Guillaume, Gaultier Garguille et Turlupin furent de ceux qui excellèrent à redonner vigueur à la vieille tradition de la farce, en la rajeunissant par l’interpolation quotidienne des faits de la chronique scandaleuse. Ils devinrent un trio légendaire.
On raconte qu'ils avaient d’abord joué des farces de leur invention sur un petit théâtre portatif, dans un jeu de Paume, près de la porte Saint-Jacques. Deux fois par jour, durant une heure, ils jouaient devant un parterre d'étudiants ravis.