Fille préférée d'un père original, et élevée dans une famille où le protocole n'était guère à l'ordre du jour, le destin d'Elisabeth, si éprise de nature et de liberté, allait basculer dans tout ce qu'elle détestait et auquel elle n'était pas préparée.
Alors qu'on s'apprêtait à fêter les fiançailles de sa soeur Hélène avec son cousin l'empereur François-Joseph d'Autriche, ce dernier eut un véritable coup de foudre pour Elisabeth qu'il n'avait pas vue depuis des années.
En 1854, elle l'épousait, devenait impératrice et découvrait un monde régit par la dure étiquette de la cour où les interdits et les conventions lui firent baptiser le Hofbourg le « palais cachot". Privée de l'éducation de ses enfants par ordre de sa belle-mère avec laquelle elle ne s'entendait pas, Sissi connut ainsi son premier deuil et commença à fuir Vienne. Ce fut le début de sa vie d'errance d'une villa à une autre.
Belle et spirituelle, entre deux abscences elle fit de la cour de la Vienne l’une des plus brillantes d’Europe. Par son charme sans pareil, elle subjuguait quiconque l'approchait. Elisabeth, consciente que sa beauté était son meilleur atout, mit tout en oeuvre pour la conserver au prix de régimes et d'exercices draconiens. Poète, républicaine, éprise d’absolu et rebelle, elle sut influencer l'empereur pour qu'il relâcha la pression sur les différents peuples que formaient l'empire. La Hongrie, sa patrie de coeur, bénéficia particulièrement de cette influence qui se conclut par la signature du "Compromis" de 1867 qui créa une double monarchie austro-hongroise.
Puis, progressivement, sous l’effet de chagrins intimes et des nombreux deuils qui la frappèrent, elle s’éloigna des manifestations officielles.
La mort, en 1857, de son premier enfant, Sophie, l’avait terrassée. Comment se remettre de l’exécution de son beau-frère Maximilien au Mexique (1867), de la folie de sa belle-sœur Charlotte - épouse de Maximilien -, de la disparition brutale de son cousin chéri Louis II de Bavière (1886) ? Comment survivre au suicide de son fils unique Rodolphe (1889) et à la mort dramatique de sa sœur, la duchesse d’Alençon, morte brûlée vive lors de l'incendie du Bazar de l'Hôtel de ville en 1897 ?
Délaissant de plus en plus Vienne, Sissi vivait séparée de François Joseph pour qui elle choisit une maîtresse. François-Joseph, qui ne cessa jamais de l'aimer, lui offrait de sompteux cadeaux comme la villa Hermès à Vienne. Elle voyageait sur son yacht et faisait de longs séjours dans son palais de Corfou, dont le nom, l’Achilleion, symbolisait sa passion pour les héros grecs en général et pour Achille en particulier. Mais, dans son sillage, la mélancolie était sa compagne de chaque instant.
En cette fin d’été 1898, Elisabeth était à Genève pour visiter incognito la baronne de Rothschild. Sa fuite en avant semblait se calmer. Elle se sentait bien.
Luigi Lucheni, lui, était là pour tuer Henri d’Orléans qui ne viendra pas. Tant pis ! A défaut d’un prétendant au trône de France, ce sera une impératrice d’Autriche.
Il guetta sa victime qui, d’ailleurs, eut le bon goût de ne pas le faire trop attendre. Sissi avait renvoyé les gardes mis à sa sécurité. Alors qu'elle se dirigeait vers le bateau public pour se rendre chez les Rothschild, le déséquilibré la bouscula fortement et lui planta un poinçon dans le cœur. Elle marcha encore, ne réalisant pas la gravité de l'agression. Elle monta sur le bateau et s'écroula. En lui dégraffant son corsage, on découvrit alors la blessure. Le trou était petit, le sang ne coulait pas.
Elisabeth expira quelques heures plus tard. Nous étions le samedi 10 septembre. Sa dépouille fut ramenée par le train jusqu'à Vienne où l'attendait François-Joseph anéanti et en larmes.
Elle voulait que son corps soit jeté à la mer, elle ne fut pas exhaussée. C’était une Habsbourg et sa place était dans le caveau impérial de la dynastie et non pas dans les abysses romantiques. Elle fut inhumée dans la crypte "Toscane" de la crypte impériale (Kaisergruft) du couvent des Capucins de Vienne où l'attendait son fils.
Puis, François-Joseph fit transporter sa sépulture dans la crypte éponyme qu’il avait fait aménager en 1908, et où il l'a rejoignit en 1916. Depuis, elle repose dans cette salle au décor froid et impersonnel qu'elle aurait détestée.
Toujours contre sa volonté, elle subit l’inévitable et traditionnelle barbarie du prélèvement du cœur et des entrailles : le premier fut déposé en église des Augustins de Vienne et les secondes en la cathédrale Saint-Étienne.
C’est ainsi que s’acheva le sublime et douloureux destin d’Elisabeth d’Autriche qui reste l’une des héroïnes les plus romanesques imaginées par l’Histoire, objet d'un véritable culte en Autriche et en Hongrie.