Avec Les Chouans (1829), s’ouvrit une période d’une vingtaine d’années durant laquelle il composa, remania sans cesse et publia environ quatre-vingt-cinq romans longs ou brefs qui lui valurent la célébrité et l’ouverture des salons mondains.
Considéré comme écrivain « vulgaire », s’il rencontra la résistance de la critique et des censeurs patentés, il était lu par toutes les femmes et un public croissant. Et Honoré, tout grisé par sa gloire, de se transformer en véritable dandy et de dépenser des sommes folles pour son ameublement et ses excentricités.
En 1832, il engagea une longue correspondance avec celle qui deviendra sa femme dix-huit ans plus tard : Eveline Hanska.
Le Colonel Chabert (1832), Eugénie Grandet (1833), Le Lys dans la vallée (1836), etc., furent autant d’ouvrages divers où il évoquait les milieux aristocratiques et petits-bourgeois de Paris et de province, développant des thèses politiques et sociales, compliquant à plaisir les intrigues les plus romanesques et cédant parfois au goût des conspirations et des influences occultes.
Avec Le Père Goriot (1835) il inaugura son système de personnages reparaissant de roman en roman. Pour autant, il ne concevait pas encore le plan d’ensemble de La Comédie humaine.
En 1838, plusieurs romans parurent dont le début des Illusions perdues, première partie de Splendeurs et misères des courtisanes qu’il acheva respectivement en 1843 et 1847.
Jonglant avec ses créanciers, il redoubla de travail lorsqu’il décida d’épouser Mme Hanska devenue veuve. En 1846, il l’installa à Paris à grands frais se ruinant chez les antiquaires. La même année, le décès de leur fils mort-né fut un coup terrible dont il ne se remit pas.
La Cousine Bette (1846) et Le Cousin Pons (1847) furent ses dernières grandes œuvres. Une maladie de cœur, aggravée d’une gangrène, l’obligeait à l’inactivité, ce qu’il supportait très mal. Epuisé, malade, Balzac sentait ses facultés créatrices décroître. Il n’en terminera plus aucun.
En 1850, malgré sa fatigue, il partit à Kiev où il épousa Mme Hanska. Par petites étapes, le couple rejoignit Paris où, à peine arrivé, Honoré dut s’aliter pour ne plus se relever. Après une longue agonie, il rendit son dernier soupir. Le jour de sa mort Victor Hugo lui avait rendu visite : « Il avait la face violette, presque noire, inclinée à droite, la barbe non faite, les cheveux gris et coupés court, l'œil ouvert et fixe. Je le voyais de profil et il ressemblait à Napoléon ».
Trente ans de préparation dans l’ombre et le silence ; dix-huit ans de création effervescente au milieu de soucis, d’aventures de toute sorte et de divertissements ; trois ans de déclin progressif : la vie de Balzac ressemblait à celle de ses personnages préférés. L’existence qu’il mena en se croyant maître de ses forces en les dépensant sans prudence, illustre tragiquement sa philosophie de l’énergie, thème majeur de son œuvre entière. Peu d’hommes ont fait preuve d’une telle démesure et gaspillé tant de forces. Dans une vie singulièrement dispersée, il reste une unique constante : le travail. Comme Raphaël dans La Peau de chagrin (1831), presque chacune de ses œuvres lui avait demandé un effort si considérable qu’elle avait rétréci inexorablement son existence.
Longtemps dédaignée par les délicats, son œuvre, issue d’une existence magnifique et douloureuse, se révèle étrangement contemporaine de la postérité qui continue à s’y alimenter.
La dépouille de l’écrivain fut exposée dans la chapelle Saint-Nicolas-du-Roule attenante à l’Hôtel Beaujon, maison de Balzac et ancienne dépendance de la Folie Beaujon.