Evaporée lors de la chute de Berlin, Bormann est l’une des plus mystérieuses et plus sinistres figures du IIIe Reich.
Durant la prise de Berlin, réfugié dans le bunker d’Hitler, Bormann fut témoin de son suicide. Devenu l’exécuteur testamentaire politique du Führer, ce dernier lui avait demandé de sauver sa vie. En fait, Hitler à peine mort, Bormann n’avait plus aucune importance. Il était redevenu celui que les généraux du Reich qualifiaient de « gratte-papier inculte et peu raffiné ». Après avoir pris congé de Goebbels, revêtu un manteau de cuir noir couvrant sa tenue de camouflage, accompagné d’Hans Baur, le pilote de Hitler, il s’engouffra dans les souterrains du métro qui étaient la seule issue possible pour rejoindre un contingent susceptible d’assurer sa fuite. Nous étions le 30 avril 1945. Bormann venait de disparaître pour toujours. Les versions de ce qu’il avait pu advenir de lui vinrent gonfler le dossier de sa sombre légende.
Des Bormann vivants et morts aux quatre coins du monde
Interrogé comme témoin lors du procès de Nuremberg, Erich Kempka, le chauffeur d'Hitler affirma qu’il avait été tué lors d’une explosion dans les sous-terrains peu après sa fuite. D’autres témoignages affirmèrent qu’il fut tué en tentant de traverser les lignes russes. Puis, ce fut au tour du chef de la jeunesse hitlérienne d’être persuadé qu’il s’était suicidé, d’ailleurs il avait vu le corps le 2 mai 1945. A défaut d'être présent au procès de Nuremberg, il y fut jugé et condamné à mort par contumace.
Le mythe était né. Des Bormann morts il en surgit de partout ; des Bormann vivants aussi.
Après le décès de sa femme, on prétendit qu’il avait fui en Argentine, puisqu’il y avait été « vu », vivant comme un millionnaire. Mais comme dans le même temps, il était aussi « aperçu » au Chili et au Brésil…
► La piste argentine
Des avis de recherches furent lancés aux quatre coins du monde. On effectua des analyses sur des dépouilles prétendues être la sienne. Dans les années soixante, le fils d'Adolf Eichmann, s’adressa au monde entier par le truchement de la télévision ; affirmant que Bormann vivait en parfaite santé en Amérique du Sud, il lui demandait publiquement de faire face à ses responsabilités.
En 1984, un journaliste cherchant la piste d’un Bormann « vivant » en Argentine mit les yeux sur un dossier
« Bormann ». Juste les yeux, car pour y mettre la main, il n’aurait jamais dû demander l’autorisation de le consulter. Autorisation non seulement refusée, mais le gouvernement argentin niera même l’existence de ce dossier.
► Une réalité bien banale
Un fait restait néanmoins singulier : s’il n’était pas mort en 1945, comment expliquer qu’il n’avait, apparemment, jamais donné signe de vie à aucun de ses nombreux enfants ?
Cramponnée au mythe, l’idée qu’il soit mort bêtement en s’échappant, comme l’affirmaient des témoins, semblait presque incongrue : il serait en fait décédé le 1er ou le 2 mai 1945 lors d’un bombardement de la ville aux abords de la station de métro Lehrt à Berlin où beaucoup de gens trouvèrent la mort.
Le 7 mai, les Soviétiques avaient fait inhumer les cadavres dans trois fosses creusées dans un parc de proximité. Son corps aurait été reconnu par l’un des soldats chargés du creusement des tombes: son témoignage fut ignoré.En 1965, le parc fut fouillé laissant apparaître un nombre impressionnant d’ossements sans que les restes de Bormann n’en soit distingués.
En 1972 de nouvelles fouilles furent effectuées près de la station Lehrter. D’autres cadavres furent découverts dont un qui attira l’attention.
L’année suivante, en comparant sa dentition avec celle de du dossier dentaire militaire de Bormann, on arriva à une conformité de pratiquement 100% permettant la quasi identification de Bormann.
Mais l’attitude du gouvernement allemand de l’époque vis à vis des S.S. en exil restant encore des plus timorée, voire sujette à caution, un seul laboratoire fut mis à disposition des scientifiques sans qu’aucune contre expertise ne soit possible.
Il fallut attendre 1998 pour que l’analyse ADN vienne confirmer les comparaisons dentaires. Enfin le dossier Martin Bormann pouvait être classé. Ses cendres furent dispersées dans la mer, tombe dans un cimetière marin à jamais anonyme.
Vraiment classé ? Non, car beaucoup contestent en bloc les analyses et ne démordent pas de la thèse
« fuite en Amérique du Sud »...