Dès 1933, le parti nazi exploita le prestigieux passé de l’ancienne ville impériale au profit des gigantesques manifestations et rassemblements. Un an auparavant, les pavés de Nuremberg se faisaient encore l’écho du délire d’Hitler.
On pourrait voir un symbole dans le choix de cette ville comme lieu du procès, mais la réalité, en étant plus prosaïque, rejoignit le hasard : le palais de justice, où va s’installer le tribunal, et la prison, reliés par un tunnel, l’hôtel de ville et le Grand Hôtel forment tout simplement un l’un des rares ensembles de bâtiments à être encore intact en Allemagne.
Churchill souhaitait que les chefs nazis arrêtés soient fusillés sans aucun procès. Mais Truman avait des vues plus idéalistes de procédures judiciaires et Staline aimait assister à un procès avant l’exécution de l’accusé. Ainsi, châtier les responsables nazis survivants et faire un exemple universel de ce châtiment, devinrent les buts de ce procès qui reste à ce jour le plus retentissant de l’histoire de l’humanité.
Si certains responsables avaient réussi à fuir, d’autres furent arrêtés en différentes circonstances. Vingt-quatre noms étaient inscrits sur la liste des accusés à traduire devant le tribunal. Le cas Gustav Krupp ayant été dissous pour raison de santé, Robert Ley s’étant pendu dans sa cellule et Martin Bormann ayant disparu, seuls vingt-et-un dignitaires étaient présents. Afin que ce procès marquât davantage les esprits, il fut décidé que les accusés paraîtraient devant un tribunal civil et non pas militaire, et qu’il s’agirait d’un vrai procès où tous auraient une réelle possibilité de se défendre : « On ne peut punir les criminels nazis en se comportant comme eux. Les dirigeants nazis doivent être équitablement jugés. Notre victoire doit être militaire et morale. » (R.H. Jackson, juge à la Cour suprême et chargé de l’instruction par Roosevelt).
Sur un plan pratique, comme on ne pouvait prouver la participation « physique » directe des accusés à leurs crimes, mais qu’il était inconcevable qu’ils puissent être considérés comme ayant les mains propres, il fallut trouver des chefs d’accusations imparables. Ils furent au nombre de quatre :
1. Conjuration pour tenter de conquérir le pouvoir absolu.
2. Crimes contre la paix avec violation de 34 traités internationaux
3. Crimes de guerre avec assassinats collectifs, tortures, esclavage et pillage
4. Crimes contre l’humanité avec persécution et extermination d’adversaires politiques ou religieux et de minorités
ethniques.
Il faut aussi rappeler que le procès concernait quatre organisations déclarées criminelles : le NSDAP (parti nazi), la S.S., le S.D. (Service de Sécurité) et la Gestapo (Police politique). Ce qui signifiait que toute personne ayant appartenu à une de ces organisations était considéré comme criminel.
Malgré tout, R.H. Jackson craignait de manquer de preuves. C’était compter sans le redoutable sens de l’organisation administratif allemand qui vola à son secours ! Tout a été conservé : courrier, photos et films accablants sont retrouvés impeccablement répertoriés dans les archives !
Un autre problème devait être résolu. Pour être certains que les accusés comprennent bien les questions, celles-ci devaient impérativement être faites en Allemand. Ce qui compliquait la tâche des trois autres langues présentes : le Français, l’Anglais et le Russe. La société IBM, en mettant en place un système performant de traduction simultanée, sut répondre aux attentes.
Les meilleurs avocats allemands étaient présents pour défendre ses ex-grands dignitaires dont le coefficient intellectuel était à une moyenne de 128 ; Schacht affichait le meilleur score avec 143 alors que Streicher se limitait à 107.
Tout étant maintenant en place, le procès de Nuremberg s’ouvrit le 20 novembre 1945.