Repéré en avril 1941, il se replia en zone libre afin d’embarquer pour Londres. Mais son bateau fut arraisonné !
Traduit devant le tribunal maritime de Toulon, pour désertion et atteinte à la sûreté de l’État, condamné à quinze mois de prison, il se lia d’amitié avec son codétenu, Pierre de Bénouville. Libéré, Hardy, alias Bardot ou Didot, rallia le mouvement Combat et devint officier de renseignement dans le groupe paramilitaire. Il devint responsable du noyautage des administrations publiques (NAP), puis chef de l’organisation « Sabotage-fer » dans l’état-major de l’Armée Secrète sous l’autorité du général Delestraint.
Juin 1943. Mauvais mois pour René Hardy, qui, il l’ignorait encore, le poursuivra jusqu’à la fin de ses jours.
Il y eut d’abord son arrestation dans la nuit du 7 au 8 juin alors qu’il se rendait en train à Paris. Barbie le fit revenir à Lyon avant de le libérer le 10. Seul Bénouville fut mis au courant.
21 juin. Afin de désigner un remplaçant transitoire à Delestraint, qui venait d’être arrêté, Jean Moulin avait organisé une réunion à Caluire, dans la maison du Dr Dugoujon. Afin de renforcer le poids de leur mouvement, Combat, dans la discussion face à Jean Moulin, Bénouville avait demandé à Hardy de se rendre à cette réunion alors qu’il n’était pas convié. Peu après l’arrivée des derniers participants, Klaus Barbie et ses hommes investissaient les lieux et arrêtaient tout le monde. Un seul put s’échapper : René Hardy.
En apparence, de nombreux éléments désignaient Hardy comme le traitre. C’est oublier bien vite toutes les manipulations subtiles des Allemands, leurs agents et contre-agents retournés avec ou sans leur gré. C’est fermer les yeux sur le cumul d’imprudences commises sciemment ou non par certains résistants ou services secrets étrangers, en l'occurence les Américains. C’est oublier les jeux personnels au détriment du collectif et la guerre des egos. C’est vouloir que les mauvais hasards n’interviennent pas dans les pages dramatiques de l’histoire en quête de bouc émissaire à défaut d'une responsabilité collective.
Un enchaînement d’évènements faisait déjà que la réunion de Caluire était vulnérable auxquels se rajoutèrent des retards : celui de Jean Moulin et Raymond Aubrac (30 mn), de Schwartzfeld (45mn). Quand ils arrivèrent, la domestique les confondit avec de vrais patients et les installa dans la salle d’attente au lieu de les monter à l’étage où se morfondaient les cinq autres. De son côté, Barbie et ses hommes, quelle qu'en soit la cause, avaient aussi perdu du temps…45 mn. S’ils n'avaient été si en retard, Moulin, Aubrac et Schwartzfeld auraient vu, en arrivant, les voitures de la police allemande et auraient rebroussé chemin. Et si les Allemands avaient été à l’heure, ces trois là auraient été absents, etc.
Et puis, en janvier, n’avait-il pas fait connaissance de la sulfureuse Lydie Bastien, dont il était fou et qui influença son comportement ? D’ailleurs l’avenir démontra sa grande proximité avec les Allemands. Par la suite, Hardy et d’autres furent persuadés qu’elle était impliquée.
Hardy reprit contact avec ses camarades résistants. Malgré les bruits désobligeants qui circulaient à son sujet, il fut caché. Après une enquête en France, il rejoignit Alger fin mai 1944. Interrogé par la Sûreté militaire, certains de ses amis résistants témoignèrent en sa faveur. Henri Frenay lui octroya un poste au commissariat des Prisonniers de guerre et déportés.
Revenu en France en septembre, le même mois, on découvrit des documents trouvés dans les locaux de la Gestapo de Marseille (rapport Flora) le mettant en cause comme agent double. En octobre 1946, un rapport de Kaltenbrunner, daté du 29 juin 1943, retrouvé dans les archives du ministère des Affaires étrangères du Reich, à Berlin, le chargeait dans le même sens.
Le 20 janvier 1947, son procès s’ouvrit devant la cour de Justice de la Seine. L’accusation reposait sur l’arrestation de Hardy, le 8 juin 1943, dans le train, et ses contacts et entretiens avec Klaus Barbie au siège de la Gestapo de Lyon.
Hardy nia son arrestation. Son avocat, Maurice Garçon, disqualifia les documents allemands, contesta la fiabilité des rapports gestapistes et déconsidéra les témoins à charge. Le 24 janvier 1947, faute de preuves, Hardy était acquitté.