Dans le petit cercle littéraire que son père avait organisé dans son hôtel parisien elle côtoya notamment Fontenelle, qui lui donna des leçons scientifiques, mais aussi Voltaire, bien avant qu’il ne devienne la grande passion de sa vie.
Etre passionnée par les études n’empêchant pas la coquetterie, Emilie adorait les vêtements, les diamants, les pompons, les chaussures et même le maquillage.
Son mariage arrangé avec le marquis Du Châtelet (1725) lui donna un rang élevé à la cour sans qu’il ne l’encombre à cause de la carrière militaire de cet époux si différent d’elle, qui lui fit trois enfants, et pour lequel elle conserva une réelle amitié en s’efforçant de sauver les apparences pour le ménager.
Car si Voltaire fut le plus influent de ses amants, il ne fut pas le seul : le maréchal de Richelieu ou le savant Moreau de Maupertuis, entre autres, connurent les plaisirs du déduit avec notre tête bien faite.
Ne fréquentant la cour que par obligation, elle ne tenait pas de salon et privilégiait les tête-à-tête avec ses brillants interlocuteurs et allait même jusqu’à se déguiser en homme pour participer aux conversations de ses amis au café Gradot, célèbre café interdit aux femmes.
A partir de 1733, Voltaire, alors en pleine tourmente, et la marquise devinrent inséparables et s’affichèrent partout ensemble. En 1735, Voltaire devant quitter Paris, elle lui proposa de se réfugier dans le vieux château de Cirey (Haute-Marne), en Lorraine alors indépendante. Coupés de tout, ils y vécurent pendant quatre ans comme des « philosophes voluptueux », travaillant jour et nuit sur des problèmes physiques ou métaphysiques. Loin des salons, des mondanités, des jaloux et des médisances, ils s’aimèrent.. Victime des propos aigres d’épistolières, notamment de Mme du Deffand qui la jalousait et la détestait, Emilie, même si elle en souffrait peut-être, conservait un esprit supérieur à ses railleries quitte à passer pour une orgueilleuse.
Auteur de plusieurs ouvrages scientifiques, dans lesquels elle chercha à incorporer les travaux de ses aînés –elle était une adepte de Newton- si elle n’inventa rien, elle rendit accessible au plus grand nombre les travaux scientifiques qu’elle considérait comme majeurs.
Passionnée par l’amour, la vie et l’étude, mais longtemps décriée par ses contemporains, elle participa aux grands débats en essayant de se placer au-dessus des querelles, même si les revirements philosophiques que connut sa pensée eurent parfois le don d’agacer Voltaire.
Vraie femme des Lumières, elle fut l’une des rares qui incarna aussi bien le cœur, l’œil et l’esprit de son siècle.
En 1746, elle s’installa à Lunéville, à la cour de Stanislas Leszczyński, où elle s’éprit du poète Saint-Lambert et délaissa Voltaire avec qui elle resta liée d’amitié. En 1749, après une grossesse difficile, elle donna naissance à une fille au château de Stanislas. Six jours plus tard, mouraient l'enfant et sa mère veillée jusqu’au bout par Saint-Lambert et Voltaire qui écrivit : « J'ai perdu la moitié de moi-même. Une amie de vingt ans que j'avais vue naître. »
Emilie fut inhumée en grande pompe en l’église Saint-Jacques de Lunéville. A l’entrée, une simple dalle noire indique l’emplacement de sa tombe.