Malheureusement, sa moralité était loin d’équivaloir son talent militaire. Surnommé « le petit Père de la Maraude » par ses soldats, ses pillages de guerre dépassaient l’imagination. Il faut dire qu’il menait grand train, était un mécène généreux, et que tous les moyens lui étaient bons pour remplir son tonneau financier des Danaïdes.
Un autre champ de bataille où il se distingua de façon éhontée, celui des femmes ! Ne songeant qu’à jouir et à dominer, ce Richelieu là se rendit célèbre par ses débauches. Déjà, à l’âge de quinze ans, une tentative de privautés sur sa marraine, la duchesse de Bourgogne (Louis XIV était son parrain), lui avait valu d’être embastillé. Une précocité prometteuse. La liste de ses maîtresses, depuis des princesses jusqu’aux prostituées, est impressionnante. Certains voulurent voir dans cet « Alcibiade français » l’incarnation de la « légèreté » et de la galanterie française. Basse débauche et crapulerie de soudard seraient sans doute plus appropriées. Des scrupules ? Pourquoi en aurait-il eu ? N’ayant aucune croyance, à côté de lui, Voltaire, son ami intime, passerait pour un dévot ! Séduisant les conquêtes du Régent et l'une des ses filles, ce dernier l'avait expédié en ambassade à Vienne en 1725.
C’est pourtant ce personnage que Louis XV choisit comme confident et comme l’un des compagnons ordinaires de sa vie, l’honorant même de la charge de premier gentilhomme de sa chambre (1744). Courtisan des toutes maîtresse royales, parfois recruteur pour le roi, il fit tout pour détourner celui-ci de sa foi. Il n’y réussit pas comme il n’arriva pas davantage à être ministre. Serviteur oui, pourvoyeur oui, mais certes pas conseiller.
En 1720, quoique sachant à peine l’orthographe, il fut reçu à l’Académie française puis à celle des Inscriptions et belles-lettres bien que fort peu lettré.
Il avait déjà été marié deux fois, lorsqu’à quatre-vingt quatre ans il convola avec Jeanne de Lavaulx, un tendron de quarante-six ans, avant de décéder à l’âge vénérable de quatre-vingt douze ans.
« 11 août 1788 Louis François Armand Duplessis duc de Richelieu et de Fronsac, pair et premier maréchal de France, chevalier des ordres du roi, connétable, premier gentilhomme de la Chambre de Sa Majesté, son lieutenant général, gouverneur de la Haute et Basse Guyenne, noble génois, l'un des XL de l'Académie française, âgé de plus de 92 ans, décédé rue Neuve-Saint-Augustin, présenté à Saint-Roch et transporté à la Sorbonne. »
Comme l’indique ce faire-part, Louis François Armand Vignerot du Plessis de Richelieu, duc de Fronsac, fut inhumé dans la chapelle de la Sorbonne où reposait son illustre grand-oncle. A la Révolution, son cercueil fut vidé de son contenu pour en récupérer le plomb et sa dépouille disparut sans jamais rejoindre sa tombe.