Comme par hasard, le roi trouva une correspondance, naturellement sortie du cabinet noir*, frauduleusement attribuée à un vieux conseiller du Parlement écrivant à on ne sait qui et dont la teneur laissait entrevoir le prix que coûterait une nouvelle favorite. Si le pli était un faux, l’idée suggérée ne manquant pas de véracité, Marie-Anne se vit subitement ignorée.
* Le « cabinet noir » désignait un service de renseignement, chargé de l'inquisition postale et de cryptographie.
Ce fut ensuite au tour de Gustave III, roi de Suède, et du tsar de s’accommoder des charmes de la belle. D’autres suivirent. A la mort du roi, elle revint à Versailles. Bien qu’elle fût en partie ruinée par la banqueroute du prince de Guéménée à qui elle avait confié une grosse somme d’argent pour la réalisation d’un des projets fumeux du prince, elle continua à vieillir tranquillement.
Durant les premières temps de la Révolution, elle se réfugia à Rouen, erra en Bretagne et en Vendée se cachant sous d’humbles tenues de servantes, trayant les vaches…
Veuve depuis 1771, en 1793, déjà âgée, elle épousa en seconde noces son cousin Louis Marie duc de Mailly (1744-1795), fils du maréchal Augustin-Joseph de Mailly. D’une santé fragile il mourut deux ans après leur union.
La tête toujours sur les épaules, en des temps plus calmes, elle devint la confidente de Chateaubriand qui était son locataire. Elle traversa l’Empire, vit le retour des Bourbons et reçut la visite de Charles X.
Lorsqu'elle mourut, Chateaubriand, venu rendre hommage à celle qu'il estimait infiniment, eut la désagréable surprise de découvrir, près de son chevet, ses héritiers en train de compter les écus d’or qu’ils venaient de s’accaparer !
Elle fut inhumée au cimetière du Père-Lachaise où sa tombe resta longtemps à l’abandon avant d’être restaurée.