Envoyé comme ambassadeur à Venise, où se lia d’amitié avec Casanova, il y acquit l’expérience dont il témoigna par la suite comme ministre tout-puissant dans le labyrinthe diplomatique des guerres européennes des années 1750. Mais après avoir joui des faveurs royales, notamment avec sa nomination comme secrétaire d'État aux Affaires étrangères, le retournement d’alliance lui valut la disgrâce et l’exil dans son domaine de Vic-sur-Aisne.
Bernis se remit de sa chute retentissante en commençant une seconde carrière dans l’Eglise à l’âge de quarante-cinq ans. Ordonné prêtre en 1760, créé cardina, puis nommé archevêque d’Albi (1764), Louis XV l’envoya à Rome, d'abord au conclave où sa mission était de contribuer à l'élection du candidat de la France Ganganelli - le futur Clément XIV, - dans le dessein d'obtenir la suppression de l'ordre des Jésuites, ce qui fut fait en 1773. En récompense, il se vit nommer ambassadeur auprès du Saint Siège et participa également à l’élection de Pie VI. Pendant vingt-cinq ans de présence à Rome il y joua les amphitryons avec volupté et tint le rôle d’un hôte fastueux et d’un observateur lucide de l’Ancien Régime finissant, servant de mentor aux diplomates qui façonnèrent la carte de la nouvelle Europe.
A la Révolution, il refusa de prêter serment à la Constitution civile du clergé, se vit priver de sa dignité épiscopale, fut inscrit sur la liste des émigrés et ses biens furent mis sous séquestre puis vendus.
Bien que dorénavant dépourvu de toute fonction officielle à Rome, il y restait influent et se démena pour y accueillir le mieux possible Mesdames Adélaïde et Victoire, filles de Louis XV. Nommé « visiteur des églises, couvents et possessions de France » pour les États pontificaux, témoin du durcissement de Rome à l’égard des idées nouvelles, il passa les dernières semaines de sa vie à tenter de ménager l’avenir, de réconcilier les Français et de subvenir aux besoins des réfugiés.
Victime de la goutte, il mourut avant que la gangrène le gagne. Son corps embaumé et revêtu des habits archiépiscopaux fut exposé sur un lit de parade. Tout Rome défila pour lui donner l’eau bénite tandis que des messes continuelles étaient dites. Après une cérémonie solennelle en l’église Saint-Marcel, on plaça son cercueil dans une caisse en cyprès puis dans une de plomb qu'on le transporta par brancards jusqu’à l’église Saint-Louis-des-Français pour y être inhumé dans la chapelle Saint-Sébastien. Bernis devait y reposer onze ans. En 1805, ses neveux firent transférer sa dépouille en la cathédrale Saint-Castor de Nîmes. Seul son cœur resta dans la ville éternelle.