Et ensuite ?
Le 13 octobre 1953, ses restes furent exhumés pour être transférés au cimetière Rochefort de Gradignan (Gironde) où sa belle famille possédait une concession. Dans son livre, Mon père, l’inspecteur Bonny, son fils, Jacques, apporte un témoignage précis sur ce transfert. Présent lors de l’exhumation, c’est lui qui transporta en voiture la boîte-cercueil contenant les ossements paternels jusqu’au cimetière de Gradignan où étaient alors présents : outre sa mère « Quelques personnes étrangères. Des gens des pompes funèbres. Le secrétaire de mairie. Le garde champêtre, […]. A quelques mètres, deux hommes se tiennent discrètement à l'écart : deux journalistes ». Une fois le curé arrivé, « Quelques prières chuchotées. Trois coups de goupillon. […]. La petite caisse descend lentement et disparaît dans le caveau en cours de construction. Aucun nom n'est gravé dans la pierre. Un jour, peut-être, j'y ferai inscrire : Pierre BONNY, né en 1895, fusillé en 1944. »
A priori, avec de tels détails, dont je n’ai indiqué que les plus explicites, localiser sa tombe, ou savoir ce qu’il en advint devait être facile. Erreur !
Si j’ai pu obtenir tous les renseignements possibles sur la concession familiale de Mme Bonny, dans laquelle il n'est pas, à mon grand désagrément, et pour la première fois dans l’histoire du site, j’ai fait l’objet d’une rétention volontaire d'informations par Michel Bélanger, un des maires adjoints de Gradignan, lui-même auteur de recherches sur Bonny.
Courriel reçu le 27 novembre 2017, en réponse à ma requête de recherche dans les archives des registres d'inhumations de la commune :
Madame,
En réponse à votre courriel d'hier adressé à la mairie de Gradignan, je me permets de vous indiquer mon ouvrage Gradignan, 1914-2014 (Bordeaux, Editions de l'Entre-deux-Mers, 2 vol., 2015, 483 p.), dans lequel j'évoque le "parcours" de Pierre Bonny "de Gradignan à Gradignan en passant par la Gestapo française" (tome I, p. 88 et 111, et tome II, p. 281-282). Je viens de terminer la rédaction du tome III, qui sera publié en 2018, et apportera des compléments d'information. J'ai rencontré les mêmes difficultés et ai eu les mêmes interrogations que vous.
Bien cordialement.
Michel Bélanger (adjoint au maire et professeur des Universités)
Mes demandes d’explications à cette réponse inappropriée sont restées vaines.
Une nouvelle et dernière tentative, directement cette fois auprès du gardien du cimetière, n’a guère été plus concluante : selon lui, même Michel Bélanger n’aurait jamais trouvé…
Voilà ! Le mystère de sa sépulture rejoint celui qui entoure le personnage lui-même.
Objet d’une abondante postérité littéraire et de nombreuses controverses, une question, qui sera pourtant à jamais sans réponse exacte, reste posée : qui était vraiment Pierre Bonny ?
Sources principales :
-L’Homme du déshonneur Par Christophe Boltanski (Libération/5 octobre 2006)
- Mon père, l’inspecteur Bonny par Jacques Bonny Ed. Robert Laffont (1975)