Louis Philippe Joseph d’Orléans ne fit pas exception à la règle. Critiqué et raillé sous Louis XV, ayant des espoirs déçus par Louis XVI, Philippe d’Orléans bascula dans l’opposition ouverte et devint à lui tout seul un véritable foyer révolutionnaire. Mais, quels que soient les tempéraments de ses ascendants aucun, excepté en rêve, n’avait jamais envisagé d’assassiner officiellement un roi. Député à la Convention sous le nom de Philippe « Egalité » qu’il prit comme symbole de sa rupture avec l’Ancien Régime, il dut s’exprimer sur le sort du roi. Tout le monde retint son souffle. [… « je vote la mort »]. Si Philippe Egalité eut des regrets, ils furent discrets car deux jours plus tard, il votait contre le sursis de l’exécution. Quoiqu’on en dise, la plupart des votants auraient compris qu’il s’abstienne, même Robespierre.
Honni par ses pairs, méprisés par ceux qui n’avaient dorénavant plus besoin de lui, le duc d’Orléans était seul. La trahison de Dumouriez, accompagné du fils aîné du duc, le futur Louis-Philippe, n’arrangea pas le sort du citoyen Egalité qui fut emprisonné au fort Saint-Jean à Marseille.
En octobre, il fut ramené à Paris et enfermé à la Conciergerie. Traduit en justice, et persuadé de s’en tirer à bon compte, il n’avait pas imaginé une telle « ingratitude ». Il resta impassible à l’énoncé de sa condamnation. On lui accorda de ne pas surseoir à son exécution. Le bourreau lui coupait les cheveux quand d’autres condamnés arrivèrent. Parmi eux, Mr de Laroque qui, reconnaissant le duc d’Orléans, marqua son indignation et lui dit : « Je ne regrette plus la vie, puisque celui qui a perdu mon pays reçoit la même peine de ses crimes ; mais je suis, je vous l'avoue, Monseigneur, bien humilié d'être obligé de mourir sur le même échafaud que vous".
A seize heures, le cortège quitta la Conciergerie. L'indifférence et le dégoût semblait davantage l’habiter qu’un courage résolu. La charrette s’arrêta devant le palais Égalité (Palais-Royal) sur la façade duquel on lisait en grosses lettres ces mots: "Propriété nationale". Le prince, comprenant la raison de cet arrêt volontaire, regarda la demeure de ses pères avant de détourner le regard avec dédain. Il assista sans faillir à l’exécution des autres condamnés.
Quand vint son tour, il regarda d'un air fier et hautain la foule qui le poursuivait de ses huées. Le seul agacement qu’il marqua fut son impatience d’en finir. Après l'avoir dépouillé de son frac, les aides du bourreau voulurent lui ôter ses bottes ; il se dégagea de leurs mains, et s'avança lui-même vers la planche en leur disant : "C'est du temps perdu, vous me débotterez bien plus aisément mort ; dépêchons-nous".