En juin 1791, il avait été de ceux chargés de ramener la famille royale de Varennes et en août 1792, il avait soi-disant tenté de stopper l’invasion des Tuileries par les émeutiers, ce qui lui valut d’être suspendu de ses fonctions de maire avant d’être réhabilité : Pétion avait l’estime populaire et sa collusion avec les insurgés n’est pas à exclure.
Arrivèrent les massacres de Septembre 1792 qu’il laissa faire. Enfin, élu à la Convention, il en fut le premier président pendant que, parallèlement, il présidait le club des Jacobins. Jérôme Pétion était alors à l’apogée de sa popularité. Plus dure fut la chute.
Par le passé, Robespierre avait eu pour lui une estime sincère mais ne pouvait plus accepter le modérantisme que Pétion affichait de plus en plus pour une monarchie constitutionnelle. L’Incorruptible passa à l’attaque. Malgré tout, Pétion osa prendre la défense de Buzot qui dénonçait la pression permanente de la Commune de Paris sur l’Assemblée. Son vote contre la mort du roi, ses assauts contre les appels au meurtre de Marat l’achevèrent. Il eut beau contre-attaquer Robespierre, il fut englobé dans la proscription des Girondins auxquels il s’était rallié.
Après avoir vainement tenté de soulever la Normandie contre la Convention, il se réfugia dans le Bordelais en compagnie de Buzot , Guadet, Barbaroux, Louvet, Valady et Salles. Durant plusieurs mois Pétion, Buzot et Barbaroux vécurent dissimulés dans une petite pièce au-dessus de la boutique du perruquier Troquart à Saint-Emilion. Mais le 17 juin 1794 au matin, une opération de débusquement menée par des dogues, spécialement dressés à cet usage et à l’attaque, fut lancée. Le soir même, Pétion, Barbaroux et Buzot reprenaient leur errance misérable.
Munis de leurs pistolets, d’un peu de nourriture mais sans papier d’identité, il eut fallu une bonne dose de chance pour sortir des mailles du filet. Hélas, la bonne fortune les avait abandonnés depuis longtemps. A l’aube de leur première nuit, ils entendirent le son d’un tambour. De leur cachette, ils ne purent constater qu’il ne s’agissait que de quelques volontaires marchant sur la route. Ils se crurent traqués par une patrouille. Pendant que Barbaroux tentait de se suicider, Pétion et Buzot se ruèrent dans les bois Saisis d’un immense désespoir face à la réalité de leur situation, les deux hommes prirent la seule décision qui s’imposait à leurs yeux.
Dans cette nuit du 18 au 19 juin des métayers entendirent deux coups de feu. Le 25, des grognements de chiens attirèrent l’attention d’un passant. Il découvrit des dogues en train de déchiqueter deux cadavres dans un champ de seigle près de la lisière du bois du dénommé "Devalz" à environ 600 mètres de l’endroit où on avait trouvé Barbaroux. Le 26, dès quatre heures du matin, le juge de paix de Castillon, accompagné d’officiers municipaux et de gardes nationaux, arriva sur les lieux et dressa son constat. Si les visages étaient reconnaissables, l’état des corps était tellement avancé que personne n’accepta de les toucher pour les examiner de plus près. Bientôt la traditionnelle foule de curieux pointa son nez. Pas de cimetière. En guise de tombes, on creusa deux fosses collées l’une à l’autre aux environs de Saint-Magne-de-Castillon. On y poussa les corps.
Les gens du coin gardèrent longtemps en mémoire le lieu des sépulture. Elles résistèrent de longues années à l’usure du temps dans le champ dit des "émigrés", avant de disparaître.
Reste un petit monument, au bord de la départementale reliant Libourne à Bergerac, rappelant l’événement : « En cet endroit le 18 juin 1794 fut transporté le Girondin Barbaroux qui, traqué par les troupes terroristes, venait de tenter de se suicider. Conduit d’abord à Castillon, il fut mené ensuite à Bordeaux où il monta sur l’échafaud. De l’autre coté de la route, dans un champ appelé longtemps le champ des émigrés, les Girondins Buzot et Petion se suicidèrent le soir de ce même jour ».