Après avoir intégré le théâtre de l’Odéon, ce fut le prestigieux théâtre du Vaudeville. Passant du répertoire populaire aux pièces d’avant-garde, trois rôles consacrèrent son talent éclectique :
-Germinie Lacerteux (1888), tirée du roman éponyme (1865) des frères Goncourt, qui à cause de son thème - les conditions misérables faites aux domestiques- suscita un véritable scandale politique et une interpellation à la Chambre, -Nora Helmer, l’épouse naïve, puis rebelle du drame Maison de poupée (1879) de Henrik Ibsen, autre sujet dérangeant, l’autodétermination de la femme, rôle qu'elle créa à Paris en 1894.
-Mais le personnage auquel Réjane finit par s’identifier est Madame Sans-Gêne, protagoniste de la pièce à succès de Victorien Sardou (1831-1908) et Émile Moreau (1852-1922). C’est ce personnage qui lui apporta en 1893, la célébrité.
Souveraine incontestée du genre comique et brillant, mais aussi fine interprète dramatique, si les spectateurs admiraient en Sarah Bernhardt un idéal grandiloquent, Réjane les réconciliait avec la réalité, sublimée par un jeu théâtral qui gardait le charme du naturel. Interprète aussi pétillante que sensible, aux côtés de Sarah Bernhardt, elle fut l'une des comédiennes françaises les plus populaires de la Belle Epoque. En 1895, elle atteignit la notoriété internationale grâce à une tournée en Amérique.
Dans les deux dernières décennies de sa carrière, elle se partagea entre les planches et le septième art à deux reprises, en 1900 et en 1911, elle joua dans une version cinématographique de Madame Sans-Gêne, œuvre dont elle a fait son cheval de bataille.
Epouse (1893) puis divorcée de Paul Porel (1905), elle se lança avec succès dans la carrière de directrice de théâtre. En 1906, elle racheta en 1906 à l’acteur et metteur en scène, Aurélien Lugné-Poë (1869-1940), le Nouveau-Théâtre qu’elle rebaptisa Théâtre Réjane et dirigea jusqu’en 1918 (Théâtre de Paris depuis 1919).
Femme énergique en dépit de sa santé chancelante, après un bref retour sur scène, Réjane mourut d’une crise cardiaque. Marcel Proust, ami de longue date de la comédienne et de son fils Jacques, fut le premier à se rendre à son lit de mort et à lui rendre hommage.
Le tout Paris des arts et une foule d’anonymes en deuil l’accompagnèrent à ses obsèques en la succursale de l’église Saint-Honoré-d’Eylau, puis au cimetière de Passy où elle fut inhumée après les derniers hommages et un long défilé d’adieux.
Avec elle, reposent son ex-mari et plusieurs de ses descendants et co-latéraux artistes, dont François Périer, mari de sa petite-fille Jacqueline Porel.